L'anxiété provoquée par la découverte d'un premier cas d'Ebola en sol nord-américain doit être canalisée intelligemment.

L'hospitalisation du ressortissant libérien Thomas Eric Duncan au Texas nous rappelle qu'une stratégie de prévention, aussi bien conçue soit-elle, sera toujours à la merci de la nature humaine. Duncan lui a porté un premier coup à l'aéroport de Monrovia, en mentant sur le formulaire qui lui demandait s'il avait été en contact avec un malade de l'Ebola. L'hôpital presbytérien de Dallas en a rajouté en le renvoyant lors d'une première visite, malgré ses symptômes et une mention indiquant son arrivée récente du Liberia. Ce cafouillage est d'autant plus préoccupant qu'il n'a pas été complètement expliqué. Il est urgent de le faire pour éviter qu'il ne se produise ailleurs.

En tardant à isoler et à traiter le malade, l'hôpital a non seulement contribué à augmenter le nombre de personnes avec qui il est entré en contact et qu'il faut maintenant surveiller, mais il a permis à l'infection de progresser à un point qui pourrait s'avérer fatal. L'état du patient n'a cessé de s'aggraver depuis samedi soir, il n'est pas certain qu'il sera encore en vie lorsque vous lirez ces lignes.

Ce cas unique a créé une onde de choc. Les autorités américaines ont reçu plusieurs signalements, tous se sont révélés négatifs. Même le gouvernement canadien s'est senti obligé de rassurer la population.

La nervosité est compréhensible. On parle d'une maladie dont les symptômes à un stade avancé (saignements par les yeux, les oreilles et les muqueuses, accumulation de fluides au cerveau, défaillance de plusieurs organes) semblent tout droit sortis d'un scénario de film d'horreur, et pour laquelle il n'existe aucun vaccin ou traitement reconnu.

Il faut toutefois être conscient que la seule façon de stopper la menace de la fièvre Ebola est d'en enrayer la propagation. Au lieu de faire une obsession quant à une improbable éclosion en Occident, on doit agir pour éviter que le virus ne s'étende à d'autres pays qui auraient du mal à le contenir. Pour cela, il est urgent d'intervenir là où il prospère, c'est-à-dire dans les pays d'Afrique de l'Ouest où l'épidémie a déjà fait quelque 7500 victimes, et emporté 3400 vies. On a déjà perdu trop de temps.

Le cas Duncan a mis les Nord-Américains aux premières loges de la lutte à l'Ebola. Voir les efforts requis pour limiter la contagion leur a fait réaliser à quel point les pays touchés ont besoin de renforts. Du moins, on l'espère.

L'armée américaine a promis jusqu'à 1000 soldats de plus que les 3000 déjà annoncés. Le Canada a envoyé un deuxième labo mobile en Sierra Leone. L'Israël, qui avait déjà fourni de l'aide, mais refusé une demande spécifique des États-Unis, a annoncé l'envoi de trois cliniques mobiles.

Personnel, matériel : les régions touchées manquent de tout. Il faudra s'assurer que les ressources déployées ne servent pas seulement à rassurer les pays riches, mais sont suffisantes pour répondre aux besoins sur le terrain.

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