À peine plus d'une semaine après le dépôt du projet de loi sur les régimes de retraite municipaux, politiciens et syndicats rivalisent de raccourcis pour gagner la bataille de l'opinion publique. On ne peut imaginer pire manière de régler un tel dossier.

Pour bien des Québécois, l'affaire est entendue. Les employés touchés sont:

a) des enfants gâtés qu'il est temps de mettre au pas

b) victimes d'un gouvernement antisyndicaliste

Les autres qui essaient de se faire leur propre idée sont priés d'attacher leur chapeau de paille avec de la broche. En effet, les déclarations contraires qui soufflent de toutes parts en ce moment donnent une impression complètement faussée de la réalité. Comment pourrait-il en être autrement? La loi cible 170 régimes disparates dans une centaine de municipalités. Elle cherche à modifier la trajectoire passée, présente et à venir, entraînant employés et retraités dans son sillage.

On se retrouve donc avec une multitude de cas de figure. Tous les régimes ne sont pas aussi déficitaires, la perte de l'indexation ne concerne qu'une partie d'entre eux, l'ajustement nécessaire pour répartir les cotisations entre employeur et employés varie grandement d'un endroit à l'autre - pour ne citer que quelques exemples. Et pour l'instant, on n'a pratiquement pas de chiffres sur la valeur des efforts attendus des employés et retraités de chaque régime.

De nombreux syndiqués se disent lésés puisqu'ils ont fait des sacrifices en échange de ces avantages aujourd'hui menacés. S'il est exact que certains employés, avocats, ingénieurs ou informaticiens par exemple, auraient pu avoir une carrière plus lucrative au privé, il faut aussi reconnaître que d'autres postes sont plus attrayants au municipal qu'ailleurs. Ce n'est pas pour rien que, de tous les employeurs auxquels on compare la fonction publique provinciale, l'administration municipale est de loin le plus généreux.

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Les syndicats ne gagneront pas au change, c'est vrai. Mais le type de négociation qu'ils réclament n'est tout simplement plus possible. La formule donnant-donnant, qui leur permettrait d'aller chercher des gains sur d'autres tableaux en échange de concessions sur les régimes de retraite, n'est pas une option, car les contribuables n'ont plus rien à donner.

Les administrations municipales passées ont pris des engagements dont on sous-estimait alors les coûts, et que les citoyens n'ont plus les moyens d'assumer depuis longtemps. On peut blâmer ces élus d'avoir toujours plié devant les syndicats. Il faut cependant se rappeler que la population, peu résistante aux inconvénients des moyens de pression, ne les a jamais beaucoup soutenus non plus.

Le projet de loi doit-il être modifié? Les parties auront l'occasion de défendre leurs points de vue lors des consultations, à la fin août. D'ici là, il serait sage de prendre les sorties des uns et des autres avec un grain de sel.

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