Croulant sous les enquêtes et contesté par sa base, l'Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ) traverse une crise majeure. Pour sortir de cette impasse, le conseil d'administration et les membres devront se montrer plus sensibles aux réalités des uns et des autres.

Même si seulement 20 % des membres de l'Ordre sont en génie civil, les ingénieurs des autres spécialités ont essuyé leur part de railleries ces dernières années. Et bien que les individus impliqués dans des fraudes ne représentent qu'une minorité des quelque 60 000 ingénieurs inscrits au Québec, il est clair que le titre a été éclaboussé.

Il faudra un jour déterminer pourquoi l'Ordre a mis autant de temps à enquêter sur les pratiques douteuses de ses membres alors que celles-ci étaient bien connues dans le milieu. Le Bureau du syndic se débat aujourd'hui avec quelque 800 enquêtes, dont environ 500 sont reliées aux fameux 3C (corruption, collusion et contributions politiques illégales), alors que jusqu'à la fin des années 2000, il en avait moins d'une centaine par an, en général pour des problèmes de nature technique.

L'organisme ne serait sans doute pas ainsi submergé s'il s'était intéressé à ces façons de faire plus tôt. Cela dit, c'est la situation dont il doit maintenant s'occuper, et vite. Il est impensable que des ingénieurs ayant bafoué l'éthique de leur profession continuent à en arborer le titre comme si de rien n'était. L'Ordre estime toutefois manquer de moyens, une analyse partagée par l'Office des professions. Il a donc imposé une cotisation supplémentaire de 90 $ par membre.

Le hic, c'est qu'elle vient d'être rejetée par les trois quarts des participants à l'assemblée extraordinaire tenue cette semaine. Trois autres décisions du conseil d'administration de l'Ordre ont subi le même sort. En théorie, ce n'est pas un problème, puisque le conseil a le dernier mot. Dans les faits, il ne peut pas ignorer la grogne : quelque 1800 membres se sont pointés à cette assemblée, soit 5 fois plus qu'il y en a d'ordinaire à l'assemblée annuelle.

Il est urgent de rebâtir les ponts. Sinon, la prochaine assemblée annuelle prévue le mois prochain risque d'être chaotique. Et si l'Ordre se retrouve paralysé, le pire est à craindre.

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Pour les hausses de cotisation, les membres doivent se faire à l'idée. D'autant qu'ils ont longtemps eu l'une des plus modestes - des 45 ordres, seuls les technologistes médicaux payaient moins cher.

Pour le reste, l'Ordre doit faire un bout de chemin. Même si les autres mesures contestées sont défendables, elles coûtent très cher à certains membres - tous n'ont pas la chance d'avoir un employeur qui assume ces frais. Sans entrer dans les détails, des allègements sont possibles puisque certaines mesures, notamment sur la formation et les assurances, dépassent les exigences de base. S'il veut retrouver l'appui des membres, le conseil devra lâcher du lest.

Les ingénieurs ont l'habitude de trouver des solutions à des problèmes complexes. Ils ont un beau cas devant eux.

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