L'entente conclue in extremis samedi par les pays membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) est une belle surprise après 12 ans de surplace, mais dans les faits, la libéralisation des échanges vient de progresser d'un pas de souris.

«Pour la première fois de notre histoire, l'OMC a vraiment «livré la marchandise»», s'est félicité le nouveau directeur général de l'Organisation, Roberto Azevêdo.

«Ce que nous avons fait à Bali est proprement extraordinaire», a renchéri le ministre indonésien du Commerce, Gita Wirjawan. «Nous avons sauvé l'OMC», a pour sa part affirmé le commissaire européen au commerce, Karel De Gucht.

Un simple «Ouf!» aurait été plus juste. Comme à Doha en 2001, on a l'impression que les ministres du Commerce sont surtout tombés d'accord... pour tomber d'accord sur quelque chose.

La conférence de Doha était animée d'un sentiment d'urgence. Moins de 3 mois après le 11 septembre, les 142 gouvernements membres devaient prouver qu'ils étaient capables de parler d'une seule voix, malgré leurs profondes différences. Ils se sont entendus pour lancer une nouvelle ronde de négociations.

À Bali, la pression venait de l'intérieur. Après 12 ans de négociations infructueuses, c'est la pertinence même de l'OMC qui était remise en question. D'autant qu'en l'absence de progrès, les accords particuliers, comme celui annoncé récemment entre le Canada et l'Union européenne, se sont multipliés. Que tous les membres aient fait l'effort de trouver enfin un terrain d'entente est donc plutôt rassurant. La modestie du résultat témoigne cependant de l'étroitesse de cet espace commun.

La partie la plus substantielle de l'entente vise à réduire les formalités administratives aux douanes et dans les ports. On espère qu'elle sera adoptée par le conseil général de l'OMC l'été prochain. L'agriculture, par contre, demeure une pomme de discorde. Les membres n'ont pu que réitérer leur volonté d'éliminer les subventions à l'exportation et autres mesures équivalentes, et d'en améliorer la surveillance d'ici là.

L'un des éléments les plus significatifs ne porte pas sur l'abaissement des barrières au commerce mais, au contraire, sur une tolérance envers les gouvernements des pays en développement qui achètent des denrées à leurs agriculteurs pour fournir de l'aide alimentaire à leurs populations démunies - une exigence non négociable de l'Inde. Un rappel éloquent des fossés qui séparent les membres.

Même si l'OMC ne manque pas une occasion de rappeler à quel point la libéralisation des échanges peut contribuer au développement, elle n'est pas une organisation humanitaire. Pour qu'il y ait entente, il faut que chacun y trouve son avantage. À voir la légèreté de l'accord auquel on est parvenu samedi, il y a encore beaucoup de travail à faire sur le principe du donnant-donnant.

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