Subir une ablation préventive pour réduire son risque de développer un cancer du sein? C'est le choix difficile que l'actrice Angelina Jolie a fait et expliqué hier sur le site du New York Times. Un témoignage éclairant pour les femmes qui, comme elle, sont porteuses d'une mutation du gène BRCA1. Les autres feraient bien de ne pas s'affoler.

«J'écris dans l'espoir que mon expérience serve à d'autres femmes», explique la comédienne et réalisatrice.

La perspective de se faire enlever les seins est un choc pour n'importe quelle femme. L'idée de subir cette ablation à titre préventif, en l'absence de cancer, est encore plus vertigineuse. Il n'est donc pas étonnant que ce récit frappe l'imagination. Si l'une des plus belles et des plus célèbres actrices du monde est capable de raconter ses trois passages sous le bistouri en trois mois, sauvetage des mamelons et pose d'implants inclus, qui peut encore être gêné d'une telle opération?

Sa lettre a touché beaucoup de gens hier. À commencer par une animatrice de CNN, qui y a trouvé le courage de parler publiquement de la double mastectomie qu'elle devra bientôt subir en raison d'un cancer.

Si cet exemple peut aider d'autres femmes à traverser cette épreuve la tête haute, tant mieux. Espérons cependant qu'il ne suscite pas trop d'inquiétudes et de tests inutiles.

L'actrice de 37 ans a posé ce geste radical parce qu'on a détecté chez elle des mutations génétiques qui augmentaient de beaucoup son risque de cancer du sein. Mais ces mutations sont rares. Des quelque 6000 Québécoises qui reçoivent un diagnostic de cancer du sein chaque année, seulement 5% environ présentent une mutation des gènes BRCA1 (comme Angelina Jolie) ou BRCA2. Inutile, donc, de se précipiter chez le médecin pour passer ce test; l'indication dépend plutôt des antécédents familiaux.

Il faut aussi savoir que la mastectomie dite prophylactique est beaucoup pratiquée aux États-Unis, même si ce n'est pas la seule façon de composer avec les mutations du gène BRCA1. Une étude sur des patientes de 9 pays n'ayant pas le cancer du sein montre que les Américaines subissent une ablation préventive plus souvent que les autres - le Canada arrive quatrième. Une chercheure américaine a aussi constaté que beaucoup de femmes soignées pour un cancer à un sein se font enlever l'autre sein même en l'absence d'indication clinique.

Plusieurs facteurs, dont l'accès aux soins, influencent un tel choix. Combien d'Américaines peuvent se payer le «traitement préventif» d'Angelina Jolie? Le dépistage coûte plus de 3000$ à lui seul. Un obstacle pour bien des femmes, a eu la délicatesse de reconnaître l'actrice.

La Cour suprême américaine se prononcera d'ailleurs le mois prochain sur la validité du brevet de Myriad Genetics sur les gènes BRCA1/2. En attendant, cette société qui a l'exclusivité du test aux États-Unis, et l'hôpital qui a effectué les opérations n'auraient pu rêver d'une meilleure pub. Espérons qu'Angelina Jolie, que nous apprécions beaucoup, n'a pas accepté d'argent de ces entreprises.

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