SNC-Lavalin soumissionne en ce moment sur le mandat le plus important de ses 102 ans d'histoire. L'objectif convoité? La confiance des clients et des marchés. Son avenir dépend de sa capacité à remporter ce contrat.

Reconnue mondialement pour son savoir-faire en ingénierie, SNC-Lavalin a attaqué ce défi interne avec le même esprit systématique. L'analyse à laquelle elle s'est livrée a débouché hier sur une stratégie à trois piliers, cinq marchés de croissance et sept pôles géographiques. On peut reprocher bien des choses à cette entreprise. Ne pas savoir où elle veut s'en aller n'en fait pas partie. Le problème, c'est qu'elle doit s'y rendre dans un véhicule qui traîne de nombreuses casseroles, et dont la mécanique pourrait lui réserver d'autres surprises.

Nouveaux PDG et président du conseil, nouveaux administrateurs, nouveau chef des affaires financières, la firme a fait beaucoup d'efforts au cours de la dernière année pour se donner un nouveau visage. Quand deux de vos ex-dirigeants sont accusés de fraude, que plusieurs de vos projets sont sous enquête, que la dégringolade de votre titre suscite des recours collectifs et que des clients potentiels vous mettent sur leur liste noire, il devient urgent de vous montrer sous un meilleur jour.

Pour bien montrer que le changement n'est pas que cosmétique, la société a recruté un chef de la conformité réputé, créé une ligne de dénonciation anonyme et doublé le personnel consacré aux enquêtes internes. Reste à voir si tout cela convaincra investisseurs et clients potentiels de lui redonner leur pleine confiance.

Le fait que la firme et ses ex-dirigeants n'aient pas encore été trouvés coupables de quoi que soit ne pèse pas bien lourd dans la balance. Ça n'a pas empêché la Banque mondiale et l'ACDI d'interdire à certaines de ses filiales de participer durant huit à 10 ans aux projets qu'ils financent.

Pour faire taire les inquiétudes, SNC-Lavalin devra livrer des résultats. Elle dispose d'un carnet de commandes et d'une réputation technique enviables, mais l'exécution de son plan stratégique sera déterminante. Il est d'ailleurs dommage que ses dirigeants se montrent aussi avares de détails sur leurs cibles d'acquisitions et sur les investissements dans des concessions d'infrastructure dont ils entendent se départir. La communication n'est pas suffisante pour rétablir la confiance, mais c'est un élément nécessaire. SNC-Lavalin devra faire des progrès à cet égard si elle veut devenir convaincante.

La prudence de ses dirigeants est compréhensible dans les circonstances, mais ils auraient intérêt à se montrer moins défensifs, et plus affirmatifs. Les nombreuses questions posées hier sur le siège social, par exemple, ont reçu des réponses positives, mais jamais directes. Qu'est-ce qui retient la direction d'affirmer clairement qu'elle le garde Montréal? Sur ce sujet comme sur n'importe quel autre, cette entreprise va devoir réapprendre à s'exprimer sans détour, sans quoi elle ne persuadera jamais qui que soit.

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