La lutte au déficit pousse-t-elle Revenu Québec à des excès de zèle? Les plaintes se multiplient et elle rechigne à avouer ses torts, montre le rapport annuel de la protectrice du citoyen.

Imposition de revenus inexistants, saisie abusive dans un compte bancaire, refus de fournir les informations nécessaires à une contestation, intérêts indus: les cas traités donnent froid dans le dos. «Le Protecteur du citoyen a dû rappeler à plusieurs reprises à Revenu Québec la nécessité d'assurer un traitement juste, respectueux et diligent», lit-on dans le document publié hier.

Le bureau de Raymonde Saint-Germain a reçu 160 plaintes fondées au sujet de Revenu Québec l'an dernier, 35% de plus qu'il y a trois ans. Et ça continue. Non seulement le volume ne faiblit pas, mais il est de plus en plus difficile d'obtenir des règlements, nous dit-on. Pas rassurant. Comment un petit contribuable peut-il obtenir justice si le Protecteur lui-même a du mal à se faire entendre? Car c'est bien de cela qu'il s'agit ici, et non de fraude fiscale.

Au nombre de dossiers traités, il est normal que le percepteur de l'État commette des erreurs. Qu'il refuse de les reconnaître et s'acharne sur d'honnêtes citoyens, par contre, est inacceptable.

Québec, on le sait, a passé une grosse commande à son Agence du revenu. En trois ans, les sommes à récupérer ont été augmentées à deux reprises. Le fisc doit trouver 3,5 milliards supplémentaires d'ici le printemps 2014, soit 75% de plus que ce qui lui avait été demandé en 2009-2010. Bref, la machine doit tourner à plein régime. Mais comme le signalait le vérificateur général l'an dernier, elle tourne un peu carré.

Communications obscures, documents non transmis, informations manquantes: le VG a lui aussi découvert des procédures inéquitables envers des citoyens. Il a également décelé des lacunes qui privaient le fisc de sommes importantes.

L'Agence du revenu, comme tous les services publics pris en défaut dans de tels rapports, a accepté la plupart des recommandations. Gardons néanmoins l'oeil ouvert.

Le ministre des Finances Nicolas Marceau a évoqué la possibilité d'intensifier encore la lutte à l'évasion fiscale pour renflouer les coffres de l'État. C'est toujours tentant. En particulier ces jours-ci, alors qu'on voit valser les millions de la corruption, nets d'impôt évidemment. Retrouver l'argent des pots de vin, fondations de maisons et autres jambons, cependant, est nettement moins facile qu'il n'y paraît à la télé. Si on demande à Revenu Québec de récupérer plus d'argent, elle le fera sans doute, mais pas forcément dans les meilleures poches.

«Assurer l'équité de traitement et le respect des droits des contribuables» et «maintenir un service de qualité [...] en faisant preuve de courtoisie à leur endroit» figurent depuis longtemps parmi les objectifs du Centre de perception fiscale. Il devrait en faire une priorité au lieu de se disperser dans de nouveaux projets.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion