L'attaque qui a fait un mort et un blessé grave au Métropolis mardi soir est un acte isolé auquel il faut éviter de prêter un sens qu'il n'a pas.

On sait bien peu de choses du suspect. Richard Henry Bain, 61 ans, exploitait une petite entreprise de forfaits de pêche à la truite sur un lac privé des Laurentides. On ne lui connaît pas de revendications ni de discours politiques, hormis une obscure déclaration sur les anglophones au moment de son arrestation. Déclaration qui, fait significatif, n'a pas trouvé d'écho dans le public.

Le tireur a agi seul. Et encore: il n'était probablement pas entièrement là lorsqu'il s'est approché, cagoulé et vêtu d'une robe de chambre, du lieu de ralliement du Parti québécois. Selon toute vraisemblance, l'élément déclencheur de cet attentat relève de la psychiatrie et non de la démocratie.

Le geste ne doit pas être minimisé pour autant. Un premier ministre entraîné en coulisse par ses gardes du corps en plein discours de la victoire, c'est du jamais vu ici. Et c'est une scène qu'on espère ne jamais voir se répéter. Car si l'image retransmise en direct était dérangeante, les événements rapportés par après étaient carrément révoltants.

La population, encore sous le choc, s'interroge. Avons-nous trop toléré la violence physique et verbale dont nous avons été témoins dans la rue et dans le discours des politiciens au cours des derniers mois?

Que nous nous interrogions sur notre responsabilité collective devant un acte aussi antisocial témoigne, mieux que n'importe quel discours, de notre aversion pour la violence. Il serait tellement plus facile de regarder ailleurs et de passer à autre chose. Mais les Québécois, soucieux d'éviter la répétition de tels drames, n'ont jamais lésiné sur les examens de conscience, aussi désagréables soient-ils. Ils font, en cela, preuve d'un zèle parfois agaçant, mais qui est tout à leur honneur.

Dans le cas présent, toutefois, les questions importantes sont beaucoup plus terre-à-terre. On doit notamment s'interroger sur la provenance des armes à feu. Comment un individu instable a-t-il pu avoir de tels engins en sa possession?

La sécurité des lieux est aussi en cause. Dans la ruelle menant à l'arrière du Métropolis, elle était de toute évidence déficiente. Un des techniciens de scène aurait perdu la vie en défendant l'entrée de la salle. Si c'est le cas, la faille est extrêmement grave. La protection d'un premier ministre ne peut pas dépendre de la bravoure d'employés qui ne sont ni formés ni assignés à cette tâche: on vient d'en avoir la tragique démonstration.

Cette attaque, aussi insensée soit-elle, aura néanmoins réussi à éclipser tout le reste. C'est beaucoup plus que ne mérite Richard Henry Bain. L'histoire se chargera de le ramener à sa place, en note de bas de page. Quant à nous, il ne faudrait surtout pas négliger l'essentiel, c'est-à-dire le véritable résultat de ces élections.

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