Les coupes fédérales dans l'inspection des aliments n'auront pas d'effet immédiat sur votre panier d'épicerie. C'est justement pourquoi elles sont inquiétantes.

Comment l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) pourrait-elle assurer une surveillance aussi efficace avec une centaine inspecteurs en moins? On ne voit pas comment, et la direction de l'agence ne fait rien pour nous en convaincre. Les consommateurs ont raison d'être préoccupés - ils ne se privent pas de le dire sur les réseaux sociaux.

Le groupe qui vérifie l'étiquetage des produits de viande avant qu'ils n'arrivent en magasin serait éliminé, indique le Syndicat Agriculture - AFPC. L'Agence, comme les autres services fédéraux touchés jusqu'ici, ne veut rien dire sur les postes ciblés.

Au Québec, l'ACIA surveille des aliments importés ainsi que les entreprises de transformation qui vendent à l'extérieur de la province. Les autres relèvent du ministère québécois de l'Agriculture (MAPAQ). Le MAPAQ ne préapprouve pas les étiquettes, mais ses inspecteurs effectuent des vérifications sur les produits mis en marché. C'est ce que veut faire l'ACIA, mais les inspecteurs sont déjà débordés, objecte le syndicat. Qui croire? La question n'est pas à prendre à la légère puisque ce sont les plus gros transformateurs qui sont sous la responsabilité de l'agence.

Le budget fédéral impose 56,1 millions d'économies sur trois ans. Que verra-t-on d'autre? C'est d'autant plus préoccupant que l'ACIA a entrepris une transformation en profondeur de ses méthodes de travail. La modernisation et la simplification de la réglementation, pour reprendre les termes de l'agence, sont des objectifs louables et sans doute nécessaires - on cherchera en vain un service gouvernemental qui n'en ait pas besoin. Mais c'est une chose d'affirmer que la salubrité des aliments demeurera la même, c'en est une autre de changer ses façons de faire sans sacrifier les résultats.

L'agence, par exemple, est en train de modifier son règlement sur l'inspection des viandes. L'un des objectifs est de faciliter l'obtention d'un permis fédéral aux transformateurs sous juridiction provinciale qui veulent vendre ailleurs au Canada ou à l'étranger. Va-t-on réduire les exigences? Et comment pourra-t-on superviser davantage de transformateurs alors qu'on aura réduit le personnel?

L'épisode de la viande Maple Leaf contaminée à la listéria, qui a coûté la vie à 22 personnes, nous a pourtant montré combien il est facile de perdre le contrôle. Le fabricant avait tout intérêt à protéger sa réputation, son programme de prévention était d'ailleurs plus exigeant que celui du gouvernement fédéral. Et c'est justement parce qu'il avait trop confiance en son système qu'il n'a pas su décoder les signaux inquiétants et négligé certaines précautions.

L'ACIA est-elle en train de recréer les conditions d'une nouvelle catastrophe? La gestion du gouvernement conservateur n'a rien pour nous rassurer.

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