La controverse entourant la vingtaine de garderies obtenues par des donateurs du Parti libéral ne doit pas nous faire oublier le vrai scandale. L'attribution de l'ensemble des 18 000 places à 7$ promises en 2008 a été pilotée de façon totalement irresponsable par la ministre de la Famille d'alors, Michelle Courchesne.

Les contributions politiques n'ont pas été considérées, a soutenu Mme Courchesne hier. À l'Unité permanente anticorruption (UPAC) d'y voir. Le Vérificateur général n'a pas étudié cette question, mais le reste de son rapport est une honte pour n'importe quel ministre.

De tous les projets annoncés en 2008, un sur cinq avait été rejeté à l'analyse. Un ministre n'a pas à approuver tout ce que ses fonctionnaires lui recommandent, mais Mme Courchesne est tombée dans l'excès contraire, faisant un usage débridé de son pouvoir discrétionnaire.

Au lieu d'intervenir à la pièce en fin de parcours, elle aurait dû s'assurer dès le départ que les choix seraient rigoureux et équitables. Et qu'ils répondraient aux besoins prioritaires. Mais là-dessus, elle a complètement failli à la tâche. Les délais alloués pour présenter et analyser les dossiers étaient ridicules, et les fonctionnaires n'avaient pas de directives uniformes pour les évaluer.

La ministre aurait pu rectifier le tir dans le deuxième appel de projets. Elle a plutôt choisi de ne pas le tenir et de donner toutes les places aux premiers soumissionnaires. Le gâchis prévisible est devenu inévitable.

Les trois quarts des projets retenus n'étaient pas de qualité. Et trois ans plus tard, près du quart des places attribuées n'existent pas encore.

Le crime parfait n'est pas celui dont on ne trouve pas le coupable. C'est celui dont on ne se rend même pas compte qu'il a fait des victimes. C'est le cas de ce gâchis. Pourtant, bien des Québécois ont été lésés dans cette affaire.

Le Protecteur du citoyen a reçu des appels de gens qui, ayant attendu la deuxième ronde, n'ont jamais pu soumissionner puisque celle-ci a été annulée. Inéquitable, a souligné, à juste titre, le Vérificateur général.

Les iniquités régionales, que les nouvelles places étaient censées corriger, ont aussi été aggravées. Près du tiers des projets ont été accordés dans des municipalités en surplus, au détriment de celles qui en manquaient.

Les parents qui avaient des besoins particuliers (poupons, horaires atypiques, milieux défavorisés, etc.) ont aussi été oubliés. Plus de la moitié des places subventionnées devaient leur être réservées. Le ministère, qui n'a pas tenu le compte, est aujourd'hui incapable de dire combien sont allées à ces priorités.

Les besoins pressants des familles évoqués cette semaine n'excusent rien. Dépenser des fonds publics à toute vapeur sans égard aux résultats, c'est à la portée de n'importe qui. D'une ministre, on attend plus de discernement. Surtout lorsqu'elle est présidente du Conseil du Trésor.

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