Les étudiants en médecine, on le sait, sont moins attirés qu'avant par la pratique traditionnelle en cabinet. Et ce n'est pas en les sermonnant sur l'importance de la prise en charge des patients qu'on les fera changer d'idée.

Les étudiants en médecine, on le sait, sont moins attirés qu'avant par la pratique traditionnelle en cabinet. Et ce n'est pas en les sermonnant sur l'importance de la prise en charge des patients qu'on les fera changer d'idée.

Des milliers de Québécois cherchent désespérément un médecin de famille. Pourquoi les jeunes omnipraticiens sont-ils si peu enclins à répondre à l'appel? Les réponses qu'apporte le Dr Philippe Karazivan dans son mémoire de maîtrise risquent d'en choquer quelques-uns. Mais si on veut vraiment améliorer la situation, on a intérêt à regarder la réalité en face.

Le Dr Karazivan, lui-même jeune médecin de famille, a interrogé une vingtaine d'omnipraticiens qui ont choisi une pratique aux antipodes de la continuité des soins: l'urgence. Les participants parlent sans détour de leurs priorités, de leurs valeurs et de l'organisation du système de santé. Avis à tous les penseurs qui prêchent l'importance d'une première ligne forte: la médecine familiale a une méchante côte à remonter.

Que veulent ces nouveaux omnis? La même chose que les jeunes de leur génération. Un travail valorisé et valorisant, à la fois flexible et stimulant, qui leur permet d'utiliser et d'enrichir leurs compétences, et donne des résultats visibles rapidement. Animés d'un grand souci de qualité et de performance dans l'exercice de leur profession, ils refusent toutefois que le travail prenne toute la place dans leur vie. C'est pourquoi les quarts de travail aux urgences, malgré l'intensité de la tâche et les horaires atypiques, leur conviennent parfaitement. Et que le «bureau», qui impose un engagement à long terme, des situations humaines complexes auxquelles ils ne se sentent pas préparés et beaucoup de paperasse, leur paraît si lourd et si peu attirant. 

La prévention, la prise en charge et la continuité des soins? Ils y croient, mais considèrent cela comme une vocation... qu'ils n'ont pas. Et franchement, allons-nous les culpabiliser de travailler à l'urgence?

Au lieu de perdre notre temps à critiquer les valeurs de cette génération, mieux vaudrait travailler sur ce qui peut être changé. La formation médicale, qui pourrait mettre davantage l'accent sur les compétences relationnelles et humaines. Et surtout, le système de santé, qui devrait joindre le geste à la parole. 

Parce que tout en déplorant que l'urgence soit devenue la porte d'entrée de la première ligne, Québec continue gaiement à y concentrer les ressources. À l'urgence, un omni gagne deux fois plus qu'en clinique et a un accès ultra rapide aux spécialistes et aux tests diagnostiques. Comment ose-t-on parler d'organisation des soins quand des médecins doivent passer des heures au téléphone pour réussir à recommander leurs patients?

Si Québec veut vraiment des médecins de famille, il va devoir faire en sorte que la pratique devienne non seulement plus payante, mais aussi plus satisfaisante professionnellement.

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