Les chefs d'États peuplés de jeunes chômeurs dorment moins bien ces jours-ci. Ils savent, depuis l'Égypte et la Tunisie, qu'ils sont assis sur un baril de poudre. Et qu'une telle situation ne peut pas être ignorée indéfiniment.

Les chefs d'États peuplés de jeunes chômeurs dorment moins bien ces jours-ci. Ils savent, depuis l'Égypte et la Tunisie, qu'ils sont assis sur un baril de poudre. Et qu'une telle situation ne peut pas être ignorée indéfiniment.

Plusieurs des facteurs à l'origine des manifestations qui ont mené à la démission du président de la Tunisie se retrouvent dans d'autres pays de la région, a écrit la firme de notation Standard & Poor's le 27 janvier dernier. Un rapport aux allures prophétiques, puisqu'on y identifie l'Égypte comme premier pays vulnérable à la contagion. Les autres? L'Algérie, la Jordanie et, à moindre degré, le Maroc.

Il faudra voir jusqu'où ira l'effet domino, mais la mise en garde est claire. Quand presque 60% de votre population a moins de 25 ans, il est dangereux de la laisser désoeuvrée et sans perspectives d'avenir. Encore plus si vous l'avez poussée à s'éduquer, comme ce fut le cas en Égypte et en Tunisie.

Cette situation explosive était pourtant connue. En avril dernier, le FMI a identifié le manque d'emplois pour les jeunes comme l'enjeu le plus évident dans les pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord.

Les régimes tunisien et égyptien n'ont pas seulement failli en matière de démocratie ou de droits de la personne. Ils ont lamentablement échoué en économie. Leur obsession du contrôle les a empêchés de voir l'essentiel: la nécessité de développer un secteur privé fort et diversifié, vecteur d'emploi et d'intégration sociale.

Cette jeunesse n'est pas seulement un défi, mais une richesse - à faire pâlir d'envie l'Occident vieillissant. Elle s'est retournée contre ceux qui n'ont pas su la mettre à profit. Avec une redoutable efficacité.

Ces jeunes ont accompli en une semaine ce que les réformistes comme moi réclamaient depuis des années, a souligné le nouveau secrétaire général du parti national démocrate égyptien, Hossam Badraoui, en entrevue à Radio-Canada.

Pas mal pour une génération que personne ne veut embaucher.

On a entendu des jeunes semblables dans les manifs d'Amman, de Sanaa et de Khartoum. Des jeunes révoltés par un système qui n'a que faire de leurs diplômes, où le piston est le seul moyen d'accéder aux rares emplois. Ils ne réussiront peut-être pas à faire tomber les régimes jordanien, yéménite et soudanais, mais ceux-ci auront désormais de la difficulté à les ignorer. Comme la plupart des États affligés de taux de chômage élevés chez les jeunes, que ceux-ci soient éduqués ou non.

On commence à peine à prendre la mesure du phénomène. Il touche aussi bien des pays comme le Kenya, où il a été identifié comme l'une des causes des violences post-électorales de 2008, que l'Afrique du Sud, où 51% des 15-24 ans sont sans emploi.

Beaucoup de jeunes Européens se débattent aussi avec des taux de chômage de plus de 20%. «Une bombe à retardement», selon le ministre britannique de l'Emploi. Ces pays-là auraient pourtant besoin de tous leurs contribuables pour financer leur dette et leurs services publics.

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