Rien ne permet d'affirmer que c'est leur travail qui a poussé au suicide quatre infirmières d'un même centre hospitalier de Québec. Ces morts violentes soulèvent toutefois des questions qu'on ne peut se permettre d'ignorer.

Rien ne permet d'affirmer que c'est leur travail qui a poussé au suicide quatre infirmières d'un même centre hospitalier de Québec. Ces morts violentes soulèvent toutefois des questions qu'on ne peut se permettre d'ignorer.

Au moins quatre infirmières à l'emploi du Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ) se sont enlevé la vie depuis un an et demi. Trois d'entre elles étaient en congé de maladie, mais une autre a dû retourner au travail alors qu'elle ne s'y sentait pas prête. Un facteur mentionné dans sa lettre d'adieu, rapporte Le Soleil après avoir parlé avec la famille. Le Bureau du coroner, qui a ouvert une investigation sur ce décès comme sur toutes les morts violentes, doit creuser cette histoire.

Cette employée n'est pas la première à avoir été contrainte à rentrer au travail par le bureau de santé de son hôpital. D'autres ont été forcées de le faire malgré l'avis contraire de leur médecin personnel. Au CHUQ, la situation s'est améliorée depuis la mise en place d'un système d'arbitrage médical, nous dit le syndicat des infirmières. Ce cas devrait néanmoins faire l'objet d'une enquête formelle, car les employés d'hôpitaux en congé de maladie se plaignent souvent de la pression exercée par le bureau de santé de leur établissement.

Le souci légitime d'éviter les abus ne doit pas faire obstacle à la guérison. Cette employée aurait-elle dû bénéficier d'un retour progressif ou être affectée à des tâches plus légères? Il faut que le coroner, ou un expert externe, réponde à cette question.

Le manque de personnel infirmier ne devrait pas servir de prétexte pour justifier de mauvais choix de gestion. Hélas, on a l'impression que c'est ce qui se produit dans bien des hôpitaux. Comment se fait-il que certains imposent beaucoup de temps supplémentaire obligatoire (TSO) alors que d'autres réussissent à l'éviter?

Cette pratique empoisonne tellement la vie des infirmières qu'en revenant de congé de maladie, plusieurs obtiennent un papier du médecin pour ne plus avoir à faire d'heures en sus. Jusqu'à 30% dans certains services, nous dit leur syndicat au CHUQ. Ces exemptions ont beau être légitimes, elles aggravent le sort de leurs collègues, de moins en moins nombreuses à se partager les heures imposées.

Mieux vaudrait que les établissements qui ont développé une dépendance envers le TSO entreprennent une démarche pour s'en sevrer. Car il y en a qui fonctionnent autrement, rappelait récemment l'Ordre des infirmières.

Le CHUQ n'a peut-être rien à se reprocher, mais la gestion est loin d'être exemplaire dans tout le réseau. Les problèmes de santé mentale, comme l'épuisement professionnel et la dépression, sont responsables du tiers des congés de maladie prolongés de l'ensemble des employés. Combien de temps va-t-on tolérer un tel climat? De grâce, n'attendons pas que des infirmières blâment leur employeur dans leur lettre d'adieu, ou s'enlèvent la vie sur les lieux du travail comme on l'a vu chez France Télécom.

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