Jusqu'où peut-on aller pour améliorer le système de santé? A-t-on le droit d'inquiéter inutilement des milliers de femmes traitées pour un cancer du sein? Le ministère de la Santé et la Fédération des médecins spécialistes doivent se poser la question. Car les résultats dévoilés hier le confirment: les problèmes des laboratoires de pathologie auraient pu se régler sans un tel drame.

L'étude exploratoire de l'association des pathologistes laissait craindre le pire. Certains labos québécois éprouveraient de graves problèmes de fiabilité, apprenait-on au printemps. Les tests refaits à Seattle viennent de dissiper ces craintes.

Sur les 7233 patientes qui ont reçu un diagnostic de cancer du sein dans les 14 mois précédant le 1er juin dernier, une quarantaine ont été privées de certains soins à cause d'une erreur de labo. Grâce aux nouveaux tests, 39 d'entre elles ont pu recevoir de l'hormonothérapie ou du Herceptin. Des erreurs de labo ont aussi été découvertes pour une quarantaine d'autres patientes, mais ces erreurs n'ont pas eu d'impact. Les médecins ont jugé, après examen des nouveaux résultats, que les traitements omis la première fois n'étaient toujours pas indiqués. Cinq autres patientes auraient pu bénéficier de traitements supplémentaires, mais elles sont décédées. Rien ne permet toutefois d'affirmer que ces soins auraient pu leur sauver la vie.

Ces résultats sont plutôt encourageants pour les quelque 6000 Québécoises qui reçoivent un diagnostic de cancer du sein chaque année. Les risques qu'elles soient privées d'un traitement à cause d'une erreur de labo sont assez minimes. Mais que d'angoisses inutiles pour en arriver là!

Car enfin, qu'a-t-on gagné au bout du compte? L'implantation de contrôles de qualité externes dans tous les labos? Des promesses d'acheter de meilleurs équipements et d'améliorer les conditions d'exercice des pathologistes? Franchement, Québec et la Fédération des médecins spécialistes auraient très bien pu parvenir aux mêmes résultats sans déchirer chemises et sarraus sur la place publique.

Québec était au courant des demandes des pathologistes. L'une de ses agences lui avait même recommandé d'imposer des contrôles externes aux labos. Pourtant, le ministère de la Santé et ceux qui en étaient responsables ont fait la sourde oreille. Et si la Fédération des médecins spécialistes n'avait pas fait autant de bruit autour de l'étude des pathologistes, le dossier n'aurait sans doute pas avancé d'un pouce. Les tests seraient la plupart du temps exacts, mais réalisés dans des conditions difficiles, qui retardent la production des résultats et ne permettent pas d'en mesurer la fiabilité.

«Les données rendues publiques aujourd'hui permettront de rassurer les femmes», a déclaré le ministre Bolduc. La belle affaire! Si tout le monde avait fait son boulot correctement, elles n'auraient jamais été inquiétées.

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