On s'en doutait, mais les vérificateurs de GM l'ont confirmé cette semaine. Le constructeur risque bel et bien la faillite, souligne son rapport annuel. Il est temps que le syndicat canadien adopte un discours plus réaliste. Ne serait-ce que par respect pour les contribuables qui vont devoir payer pour sauver ses membres.

Les trois grands de l'automobile ont souvent été qualifiés de dinosaures, mais le terme va comme un gant à leurs syndicats. Le discours du président des Travailleurs canadiens de l'automobile, jeudi matin, datait clairement d'une autre ère géologique. «Nous pouvons maintenir nos régimes de rémunération et de retraite existants», a martelé Ken Lewenza, alors que la précarité de GM venait tout juste d'être confirmée. Qui espère-t-il convaincre?

 

L'aide financière d'Ottawa, faut-il le rappeler, est conditionnelle à ce que les constructeurs réduisent leurs coûts. GM Canada veut obtenir des concessions sur la rémunération et les retraites, mais les TCA prétendent que ce ne sera pas nécessaire. Outre des compromis sur les avantages sociaux, ils comptent surtout sur la différence de taux de change et la productivité des usines pour démontrer l'avantage de la main-d'oeuvre canadienne. C'est un peu mince. L'usine d'assemblage de Ford à Atlanta était l'une des plus efficaces et des plus productives aux États-Unis. Mais comme le soulignait récemment le Wall Street Journal, ça n'a pas empêché le constructeur de la fermer en 2006.

Les TCA se voient comme d'innocentes victimes de la tourmente économique. Ils devraient plutôt se compter chanceux d'être en difficulté à un moment où le gouvernement n'a pas le choix de les aider. D'autres travailleurs, en particulier ceux de la forêt, n'ont pas eu cette chance.

C'est d'ailleurs la seule raison pour laquelle ce syndicat a encore un peu de pouvoir de négociation. Sans les promesses d'aide financière d'Ottawa, les constructeurs n'auraient pas beaucoup de sentiments pour leurs usines canadiennes. Surtout avec toutes celles qu'ils vont devoir fermer chez eux. Les TCA, cependant, ne constituent qu'une partie de l'équation. Et il est grand temps qu'ils s'en rendent compte. Ce ne sont pas seulement vos gros salaires que le gouvernement veut sauver, les gars, mais les dizaines de milliers d'emplois qui dépendent de l'industrie automobile au Canada.

Tous ces gens (concessionnaires, fournisseurs, fabricants et distributeurs de pièces, etc.) vont devoir faire des sacrifices considérables pour que les constructeurs américains restent ici. S'ils n'avaient pas autant de ramifications dans l'économie, Ottawa aurait eu bien du mal à faire accepter le principe d'un plan de sauvetage.

Et parmi les contribuables qui vont financer cet effort, il y en a beaucoup qui ont perdu leur emploi, qui craignent de le perdre bientôt ou qui ont fait des concessions importantes pour le conserver. Alors, il serait temps que Ken Lewenza change de disque. Qu'il défende les conditions de ses membres à la table de négociation, c'est normal. Mais qu'il claironne qu'ils vont s'en tirer sans une égratignure alors que tout le monde est en train de passer dans le tordeur, c'est indécent.





 

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