:L'industrie des sables bitumineux ne détruit pas seulement l'environnement. Elle vient d'éclabousser sérieusement l'image du Canada aux États-Unis. Grâce au National Geographic, des millions d'Américains ont désormais une vision très noire de notre production pétrolière. Et ce n'est pas fini.

Les écologistes le répètent depuis des années: extraire du pétrole des sables bitumineux est une activité horriblement polluante. Plusieurs reportages ont déjà été diffusés sur le sujet aux États-Unis, mais rien qui n'ait l'envergure du National Geographic. Un dossier de 24 pages dans un magazine qui tire à 8,5 millions d'exemplaires, ça ne passe pas inaperçu. Surtout avec des exergues qualifiant les installations de raffinage de «sombres usines sataniques» (en référence à un vers du célèbre poète anglais William Blake), et un vidéo dans lequel des Amérindiens exposent la dégradation de leur territoire.

 

C'est ce dernier point qui risque de faire le plus de dégâts. Les milliers de tonnes de gaz à effet de serre générés par cette industrie contribuent de façon honteuse au réchauffement climatique. Le phénomène, hélas! n'est pas très visuel. Mais des milliers d'hectares de forêt rasés sous le regard impuissant des autochtones? Une rivière qui sent les oeufs pourris? On ne parle plus d'un enjeu environnemental abstrait, mais d'une tragédie à visage humain. Ça va faire très mal.

Et ça ne s'arrêtera pas aux États-Unis. Hier, une coopérative de services financiers britannique a avancé 50 000 livres à la nation crie Beaver Lake pour la soutenir dans sa bataille judiciaire contre l'Alberta. Ces Cris réclament une injonction contre plus de 16 000 permis d'extraction qui, selon eux, mettent en péril leur mode de vie ancestral. Des fonds étrangers pour aider des autochtones à se défendre contre les multinationales? Ce n'est qu'une question de temps avant que les comparaisons avec l'Amérique du Sud et l'Amazonie ne se mettent à fuser. Il ne manquerait plus qu'une équipe de la BBC s'intéresse aux conditions de vie misérables qui règnent dans certaines réserves...

Plusieurs craignent que toute cette publicité négative n'incite les États-Unis à boycotter le pétrole albertain. Ce serait étonnant. Sur le plan politique, les substituts en provenance du golfe Persique ou du Venezuela ne sont pas plus désirables pour nos voisins. C'est plutôt la perception générale du Canada à l'étranger qui risque d'être affectée. Un impact diffus, mais qui pourrait s'avérer très dommageable à long terme. Si les plaines noirâtres et visqueuses de Fort McMurray viennent supplanter, dans l'imaginaire populaire, les animaux sauvages et la blancheur des montagnes Rocheuses, on ne donne pas cher de l'industrie touristique dans l'Ouest canadien.

 

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