Cette année encore, des milliers de jeunes Québécois ont reçu un cadeau techno, comme un ordinateur ou un cellulaire muni d'une caméra numérique, avec lequel ils partageront leurs opinions, leurs images et même leurs émotions en ligne. Sont-ils conscients des traces qu'ils laissent, et qu'ils risquent de regretter un jour?

Le problème n'est pas neuf; plusieurs médias, dont La Presse, en ont parlé. Les employeurs sont de plus en plus nombreux à soumettre les noms des candidats à l'embauche au test du moteur de recherche. Les plus vieux ne sont pas nécessairement plus sages, mais ils ont eu la chance de vivre leur jeunesse à une époque où les occasions de s'exprimer sur la place publique étaient rares et laissaient peu de traces. Quant aux photos compromettantes, elles n'existaient qu'en format papier et finissaient généralement dans un tiroir. Bref, ils ont été protégés contre eux-mêmes.

 

Les plus jeunes n'ont pas eu cette chance. Et aujourd'hui, certains donneraient cher pour effacer une partie de leur empreinte numérique. Hélas, ce n'est pas toujours possible. L'Université de la Colombie-Britannique a d'ailleurs créé un site, baptisé Digital Tattoo, pour montrer qu'une information en ligne peut durer aussi longtemps, et être plus difficile à effacer, que n'importe quel tatouage.

Ces efforts de sensibilisation sont sûrement utiles, mais il ne faut pas s'attendre à ce qu'ils révolutionnent les comportements. L'internet a favorisé l'émergence d'une culture d'expression qui n'a rien de passager. Les jeunes qui arrivent aujourd'hui sur le marché du travail n'ont pas connu autre chose, et leur poids ira croissant. Il faut plutôt se demander comment ils influenceront les attitudes au moment de l'embauche.

Pour l'instant, c'est loin d'être clair. Les employeurs devront apprendre à relativiser, ont fait valoir plusieurs lecteurs sur notre blogue éditorial. Effectivement, les recruteurs devront s'interroger sur l'importance des informations qu'ils trouvent sur l'internet. Des propos dérangeants écrits à l'âge de 15 ou 17 ans sont-ils vraiment significatifs? Dans bien des cas, le candidat qui se trouve devant eux n'a plus rien en commun avec l'individu qui les a publiés. Bien sûr, on peut lui reprocher son erreur de jugement, autant dans les déclarations que dans la décision de les publier. Mais qui peut prétendre ne jamais avoir commis d'erreur de jugement avant l'âge de 20 ans?

Les jeunes travailleurs qui embaucheront du personnel seront sans doute moins troublés par ce qu'ils trouveront en ligne. Mais il ne faut pas se faire d'illusion. La vérification du dossier de crédit et du casier judiciaire est déjà la norme, les contrôles à l'embauche ne vont pas aller en diminuant.

La présence sur l'internet continuera de faire l'objet d'un examen attentif. On peut toutefois s'attendre à ce qu'elle soit considérée de façon plus large, non pas seulement pour trouver des poux, mais aussi pour voir les réalisations concrètes du candidat. Cela se fait déjà dans plusieurs domaines, notamment dans ceux qui touchent les technologies et la création, et c'est une approche qui est appelée à se généraliser. Tant mieux, car elle fournit une image beaucoup plus complète et nuancée, donc plus représentative, d'un individu.





 

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