«Montre-moi donc ta foi qui n'agit pas; moi, c'est par mes actes que je te montrerai ma foi.» - Épître de Jacques

Ce passage de l'épître de saint Jacques, Jean-Claude Turcotte aurait pu l'écrire tellement il résume bien sa vision du sacerdoce. D'ailleurs, le cardinal aimait bien cet apôtre qui, disait-il, «n'était pas un grand intellectuel» et «aimait les réalités concrètes et les affirmations reliées à la vie quotidienne.» Tout comme le cardinal Turcotte.

Depuis son décès, hier, on a beaucoup loué les talents de communicateur de celui qui a dirigé d'une main sûre le diocèse de Montréal pendant 22 ans. Ce talent reposait sur une simplicité naturelle qui tranchait avec l'attitude plus distante et la grandiloquence de ses prédécesseurs.

Très à l'aise devant les caméras, Jean-Claude Turcotte a cherché à dépoussiérer l'image de l'Église. Cependant, tout comme Jean-Paul II, malgré son charisme extraordinaire, n'a pu ramener au catholicisme les Occidentaux qui l'avaient délaissé, l'archevêque de Montréal n'a pas réussi à combler le fossé creusé par la Révolution tranquille. Surtout que, pour ce qui est du contenu du message, Son Éminence n'a jamais dérogé de l'orthodoxie romaine. Le cardinal savait très bien que l'Église devait, à tout le moins, changer de ton, par exemple en matière de morale sexuelle. Mais il n'allait pas lui-même brasser la cage.

Il serait injuste de résumer l'oeuvre de Jean-Claude Turcotte à la sphère des communications. L'essentiel de son action a été menée discrètement, dans son travail auprès des démunis et dans son appui aux organismes communautaires. «Un chrétien, une paroisse, un sanctuaire, une Église qui veut transmettre la foi au Christ doit savoir aimer comme Lui, en osant aller vers les plus pauvres et les plus faibles», prêchait-il.

En cela, il a été fidèle au dévouement qui fut celui de la plupart des prêtres dans l'histoire du Québec, un dévouement dont le souvenir a été balayé par les abus dégoûtants d'une minorité. Paradoxalement, c'est pour protéger la mémoire de ce «travail historique des communautés religieuses» que Jean-Claude Turcotte, avec les autres évêques de la province, a fait preuve d'une impardonnable rigidité à l'égard des «orphelins de Duplessis». Une rare tache sur son bilan.

C'est avec bonheur que le cardinal Turcotte a participé, il y a deux ans, à l'élection du pape François. Un homme simple, un homme de terrain, comme l'apôtre Jacques, comme lui. «Il apportera des changements nécessaires à l'Église», a-t-il déclaré à l'issue du conclave.

Le cardinal Turcotte était convaincu qu'après la mort se trouve un monde «où la souffrance n'existe plus, où la justice véritable règne». Et dans ce monde, espérait-il, «je connaîtrai le bonheur auquel j'aspire de toutes mes forces». Ce bonheur éternel, Jean-Claude Turcotte l'a amplement mérité. Par sa foi inébranlable. Et surtout par ses actes.