Avant d'être une victoire pour le Parti libéral du Québec, les élections d'hier constituent une défaite pour le Parti québécois tel que dirigé par Pauline Marois. En effet, c'est la première ministre sortante et son équipe qui ont élaboré et exécuté la stratégie qui devait leur permettre de former un gouvernement majoritaire. C'est cette stratégie que la majorité des Québécois ont rejetée hier.

En particulier, l'électorat a condamné le tour de passe-passe référendaire que tentait de leur jouer le Parti québécois. Les Québécois ont dit catégoriquement NON aux astuces des tacticiens péquistes: avec 25% du vote, le PQ a enregistré son pire résultat depuis le premier scrutin auquel il a participé, en 1970 (23%).

De plus, si un grand nombre de Québécois étaient favorables à la mise en place de balises relatives aux accommodements religieux, plusieurs n'ont pas apprécié que les péquistes se servent de ce dossier délicat à des fins partisanes, divisent les Québécois dans l'espoir de régner.

Rejetant le Parti québécois, quelque 40% des électeurs se sont tournés vers l'alternative la plus rassurante, le Parti libéral dirigé par Philippe Couillard. Par son aplomb et son intelligence, celui-ci a réussi à atténuer les mauvais souvenirs laissés par le gouvernement de Jean Charest.

Le Parti libéral revient au gouvernement moins de deux ans après en avoir été chassé. Cette circonstance particulière ouvre des pièges que les libéraux devront absolument éviter, en particulier l'arrogance. M. Couillard devra dès le départ placer très haut la barre de l'éthique; la population ne tolérera aucun laisser-aller dans ce domaine.

Le PLQ a centré sa campagne sur l'économie. À lui de livrer la marchandise, c'est-à-dire de créer un climat favorable à l'investissement, à l'entrepreneurship, à l'innovation et à l'exploitation durable de nos ressources naturelles.

Le nouveau gouvernement se retrouvera, comme le précédent, sans marge de manoeuvre financière. Des ajustements douloureux doivent être apportés pour sortir l'État québécois du déficit structurel qui le condamne à l'endettement et aux compressions arbitraires. M. Couillard n'a pas fait campagne sur ce thème - c'était le cheval de bataille de la CAQ. Avant d'avancer sur ce terrain miné, il devra éviter l'erreur du précédent gouvernement libéral et mettre la population dans le coup.

Enfin, les libéraux devront clore correctement le débat sur les accommodements religieux en faisant adopter une Charte de la laïcité respectueuse à la fois des préoccupations de la majorité et des droits des minorités.

François Legault doit être félicité pour avoir tenu le coup devant de puissants vents de face. Son parti, qui était menacé de disparition, a remporté plus de sièges qu'en 2012, avec une proportion des votes frôlant celle obtenue par le PQ. Aux caquistes maintenant de s'imposer comme solution de rechange et de briser ainsi - enfin! - la polarisation fédéralistes-souverainistes qui piège les électeurs de la province depuis quatre décennies.

Au Parti québécois, cette défaite provoquera de douloureux questionnements. La formation fondée par René Lévesque devra remettre en question le virage identitaire pris au cours des dernières années, virage qui, pour des raisons strictement partisanes, a fait un tort considérable au Québec.

Encore plus difficile sera la réflexion sur la raison d'être du PQ, l'indépendance. Quel que soit l'aboutissement de cette introspection, les résultats d'hier devraient inciter les péquistes à abandonner la stratégie de l'équivoque au profit de celle de la clarté.