«L'Italie se meurt à cause de la seule austérité. Les politiques en faveur de la relance ne peuvent plus attendre», a déclaré hier le nouveau premier ministre de l'Italie. Enrico Letta a ainsi ajouté son nom à la liste de plus en plus longue de ceux de dirigeants européens réclamant qu'on relâche la pression sur les pays en difficulté.

Déjà, la Commission européenne et le FMI ont accepté de donner quelques années de plus aux pays lourdement endettés pour ramener leur déficit à un niveau raisonnable. Même le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schaeuble, en a convenu: «Si la conjoncture se détériore, il ne faut pas aggraver la situation par des compressions supplémentaires.»

Cette souplesse est bienvenue; on doit permettre à la population des pays les plus durement touchés de souffler. Toutefois, la vigilance est de mise. Le risque est grand que ne se perde le momentum en faveur des réformes en profondeur lancées à la faveur de la crise. Or, ces réformes sont la clé de la prospérité durable de l'Europe.

Il faut le rappeler, ce n'est pas l'austérité qui est à l'origine de la récession et du chômage. La crise financière de 2008-2009 a fait si mal dans certains pays du vieux continent parce qu'elle y a exacerbé des faiblesses structurelles: endettement public excessif, fiscalité déficiente, marché du travail sclérosé, etc. Si les pays concernés n'apportent pas les correctifs nécessaires, leurs économies resteront peu compétitives et vulnérables aux chocs.

Les critiques de l'austérité, qui se plaisent à dénoncer les spéculateurs, l'Allemagne, la Commission européenne et le FMI, se trompent de cibles. Les créanciers ne sont pas responsables du surendettement. Les compressions n'ont pas causé le chômage (même si elles ont pu l'aggraver).

N'en déplaise aux socialistes français, qui rêvent d'«investissements massifs» des États, la reprise viendra essentiellement du secteur privé. Et les gouvernements ne retrouveront la faveur des prêteurs que lorsqu'ils auront fait le ménage dans leurs affaires. Des changements importants s'imposent donc, et ceux-ci heurteront nécessairement des acquis et des habitudes. La fermeté d'Angela Merkel en exaspère plusieurs, mais si elle n'insiste pas sur la rigueur, qui le fera?

Dans son discours d'hier, le premier ministre Letta a annoncé des nouvelles susceptibles de plaire à la population italienne (et à son partenaire de coalition, le revenant Silvio Berlusconi), notamment la suspension de la nouvelle taxe sur les résidences principales. Cependant, il n'a pas dit grand-chose sur la façon dont il équilibrera les finances publiques et sur le contenu de ses «politiques en faveur de la relance». Pas plus que ses prédécesseurs et ses homologues européens, il ne pourra échapper aux exigences de la réalité économique. Sous peine de condamner son pays au marasme.