Le budget présenté hier par le ministre des Finances du Québec, Nicolas Marceau, ressemble davantage à ceux de ses prédécesseurs libéraux qu'au programme électoral du Parti québécois. Ce dernier promettait un virage radical; M. Marceau met plutôt en place une série d'ajustements à un cadre pour l'essentiel inchangé. La difficile réalité fiscale du Québec s'est imposée: la dette et les dépenses publiques sont trop élevées pour une économie relativement peu prospère.

Cela étant, M. Marceau, bien qu'il s'en défende, a laissé tomber plusieurs engagements pris par son parti lors de la campagne électorale. La contribution santé devait être abolie; elle demeure, mais est rendue progressive (en soi, une très bonne chose). La hausse du tarif de l'électricité patrimoniale devait être annulée; il y aura bel et bien hausse, mais celle-ci sera moins forte que ce qu'avait annoncé Raymond Bachand.

Le Fonds des générations devait devenir un simple canal de transmission des sommes destinées au remboursement de la dette; finalement, le Fonds continuera d'investir lesdites sommes, conformément à l'approche du gouvernement précédent. Un nouveau régime de redevances minières, plus onéreux pour l'industrie, devait être mis en place; l'engagement demeure, mais le gouvernement annonce qu'il consultera les intervenants concernés afin de «faire ces changements de façon ordonnée et responsable pour assurer la viabilité du secteur minier».

Le gouvernement Marois conserve la cible fixée par M. Bachand: déficit zéro en 2013-2014. Pour y arriver dans un contexte de ralentissement de la croissance économique, Québec devra fortement comprimer la croissance de ses dépenses (1,8%). On verra au cours des prochains mois quels impacts concrets auront ces compressions. Il y aura certainement de la grogne, mais l'état des finances publiques ne laisse pas plus de choix aux péquistes qu'il n'en laissait aux libéraux. Même chose pour l'augmentation du fardeau fiscal, entre autres pour les consommateurs de tabac et d'alcool (voir l'éditorial suivant).

Enfin, nous applaudissons la déclaration du ministre des Finances selon laquelle «il n'est pas question que le gouvernement s'immisce dans la gestion quotidienne» de la Caisse de dépôt et placement. Sa volonté ferme de favoriser l'investissement privé, «clé de la croissance future» selon les documents budgétaires, est également bienvenue.

Les premières semaines du gouvernement Marois avaient fait craindre un dangereux dérapage à gauche. À cet égard, le budget déposé hier est rassurant. La première ministre doit maintenant calmer les ardeurs de ses ministres plus radicaux dont les déclarations intempestives contredisent de temps à autre l'approche modérée de M. Marceau.