Les données sur l'emploi publiées hier par Statistique Canada révèlent un marché du travail stagnant en ce début d'année: pratiquement pas de création d'emplois au pays en janvier, une légère hausse du taux de chômage à 7,6%. Au Québec, l'hémorragie du dernier trimestre de 2011 a été stoppée, mais pas renversée; la province a perdu 45 000 emplois depuis un an. Et c'est évidemment sans compter les 700 emplois de l'usine Mabe, à Montréal, dont on a appris la semaine dernière la fermeture prochaine.

Heureusement, pour une fois, les nouvelles des États-Unis sont bonnes, laissant présager une reprise un peu plus vigoureuse. Les statistiques publiées hier par le ministère américain du Travail indiquent que 243 000 emplois ont été créés pendant le premier mois de l'année. Le taux de chômage a diminué à 8,3%, le niveau le plus bas en trois ans. Même si certains facteurs techniques ont pu jouer, la plupart des économistes ont vu dans ces données une indication que la sortie de crise pourrait enfin s'accélérer. Ce serait une bénédiction pour notre économie.

Il faudra évidemment attendre les statistiques des prochains mois pour voir s'il s'agit d'une tendance. Cela n'est pas certain. Jeudi, le président de la Réserve fédérale, Ben Bernanke, soulignait qu'«il reste encore beaucoup de chemin à parcourir avant de pouvoir dire que le marché de l'emploi fonctionne normalement.»

Le Canada, notamment le Québec, a beau avoir un peu diversifié ses marchés, les États-Unis restent de loin les principaux acheteurs de nos produits. Soixante-dix pour cent (70%) des revenus des fabricants québécois tirés des exportations proviennent de nos voisins du sud. Comme le souligne dans une récente étude l'économiste principale de Desjardins, Joëlle Noreau, «il y a un lien indissociable entre la bonne santé de l'économie nord-américaine et le secteur manufacturier du Québec.»

L'annonce de la fermeture de l'usine Mabe, s'ajoutant à celles faites il y a un an du déménagement d'Electrolux (L'Assomption, 1300 emplois perdus) et de la fermeture de la raffinerie Shell (Montréal-Est, 800 emplois) a suscité de vives inquiétudes quant à l'avenir du secteur manufacturier au Québec. Les Manufacturiers et Exportateurs du Québec et le Parti québécois réclament du gouvernement provincial une «stratégie manufacturière». Déjà, en 2007, Québec avait lancé un Plan d'action en faveur du secteur manufacturier. Peut-il faire davantage? Peut-être. Toutefois, aucune stratégie gouvernementale n'aurait empêché les fermetures d'Electrolux, de Shell et de Mabe. À moins de gaspiller l'argent des contribuables, comme l'a fait Memphis afin d'attirer Electrolux (au moins 188 millions US).

Outre une nécessaire amélioration de la productivité, le remède aux maux du secteur manufacturier du Québec se trouve dans la remise sur pied du malade américain. De ce côté il y a, enfin, une lueur d'espoir.