Les chefs de gouvernement du G20 ont annoncé vendredi la nomination du Canadien Mark Carney à la présidence du Conseil de stabilité financière (CSF), l'institution internationale chargée de coordonner la réforme du système financier lancée à la suite de la crise de 2008-2009. Le gouverneur de la Banque du Canada hérite là d'une tâche difficile.

Depuis sa création, le Conseil a réalisé un important travail de déblayage. À Cannes, il a publié la première liste des banques d'importance systémique mondiale, c'est-à-dire dont la taille est telle que leur faillite entraînerait des conséquences néfastes pour l'économie planétaire. Ces institutions - il y en a 29 - seront tenues de garder dans leurs coffres une part d'actifs solides plus importante que les autres banques.

Toutefois, comme l'a admis le CSF dans une lettre aux dirigeants du G20, «il nous reste beaucoup à faire pour mettre en place complètement et uniformément les réformes auxquelles nous nous sommes engagés». La réforme du système financier suscite une résistance certaine. Mark Carney a pu s'en rendre compte en septembre dernier lorsque, dans le cadre d'une rencontre avec des banquiers américains, il a été pris à partie par Jamie Dimon, PDG de JPMorgan Chase, furieux que le Canadien ait endossé l'idée d'exigences plus grandes pour les banques «too big to fail».

Les observateurs s'attendent à ce que, sous M. Carney, le CSF soit encore plus dynamique qu'il ne l'a été jusqu'à maintenant. D'autant qu'à Cannes, les chefs de gouvernement ont convenu de lui fournir plus de moyens.

Ironiquement, la nomination de Mark Carney est survenue la semaine même où un autre ancien de Goldman Sachs, Jon Corzine, faisait la manchette des médias financiers. Après avoir présidé aux destinées de Goldman Sachs dans les années 90, Corzine avait bifurqué vers la politique. Puis, en 2010, il a pris les rênes d'un vénérable courtier spécialisé en contrats à terme, MF Global. Rêvant d'en multiplier la rentabilité, il a décidé de parier quelques milliards des fonds propres de la firme sur... la dette souveraine des pays européens, telles l'Italie et l'Espagne. Lorsque cela s'est su, les créanciers se sont affolés, la descente aux enfers a commencé et en quelques semaines, MF Global a été acculée à la faillite. Effet de levier excessif, utilisation possible de l'argent des clients, données financières faussées : ce n'est pas l'absence de règles qui a entraîné la faillite de MF Global, mais leur violation systématique par Corzine.

Ce qui fait dire à certains qu'ajouter de nouvelles règles est non seulement inutile - il y aura toujours des gens imprudents ou malhonnêtes - mais nuisible, particulièrement en période de croissance anémique.

Lutter contre la résistance des uns et le fatalisme des autres: telle sera la mission de Mark Carney.