Dans la foulée des élections du 2 mai, quelques éditorialistes et chroniqueurs du Canada anglais ont pressé le gouvernement Harper de profiter de sa majorité pour remettre le Québec à sa place. Selon le chroniqueur Lorne Gunter, du National Post, les conservateurs ont une occasion unique «de mettre un terme à l'hégémonie du Québec sur la politique canadienne».

Dans la foulée des élections du 2 mai, quelques éditorialistes et chroniqueurs du Canada anglais ont pressé le gouvernement Harper de profiter de sa majorité pour remettre le Québec à sa place. Selon le chroniqueur Lorne Gunter, du National Post, les conservateurs ont une occasion unique «de mettre un terme à l'hégémonie du Québec sur la politique canadienne».

Plusieurs commentateurs pressent le gouvernement d'augmenter le nombre de députés des provinces sous-représentées à la Chambre des communes, ce qui entraînerait automatiquement une diminution du poids du Québec au Parlement. On souhaite aussi que les conservateurs abolissent le financement public des partis politiques, ce qui aurait pour effet, selon les journaux Sun, d'«empêcher toute résurrection du Bloc québécois». Le Globe and Mail et la chaîne Sun invitent le chef du NPD, Jack Layton, à laisser tomber certains des engagements qu'il avait pris afin de séduire l'électorat québécois.

On peut bien sûr s'offusquer du ton de certains de ces commentaires. Par exemple, les journaux Sun disent des Québécois qu'ils sont des «fauteurs de trouble méritant un examen psychologique», des propos insultants et inadmissibles. Cela dit, pour le reste, les Québécois récoltent ce qu'ils ont semé. Le fait que, pendant plus de 15 ans, ils ont choisi des députés indépendantistes pour les représenter à Ottawa a beaucoup nui à notre image dans le reste du pays. Ceux qui étaient déjà convaincus que les Québécois étaient d'éternels plaignards ont vu leurs préjugés confirmés. Ceux qui étaient mieux disposés à notre égard ont fini par conclure qu'en effet, nous ne voulions rien savoir du Canada... sauf la péréquation.

Le Canada a beaucoup changé au cours de la dernière décennie, période pendant laquelle les Québécois se sont graduellement éloignés de la gouverne du pays. À force de déchirer sa chemise chaque semaine, le Québec a perdu beaucoup de crédibilité. De plus, le pouvoir économique et politique s'est déplacé vers l'Ouest, de sorte que le Canada central (le Québec, mais aussi l'Ontario) est moins pesant qu'il l'était.

Le gouvernement Harper et l'opposition néo-démocrate doivent ignorer les appels vengeurs de la presse anglophone. Au contraire, conservateurs et néo-démocrates portent la responsabilité historique de s'assurer que dans ce nouveau contexte, les politiques fédérales tiennent compte des préoccupations légitimes du Québec. M. Harper s'est engagé à gouverner pour tous les Canadiens, y compris ceux qui n'ont pas voté pour lui; faut-il rappeler que c'est le cas de 83% des électeurs du Québec?

Cela dit, ces derniers devront être cohérents: ayant choisi d'être représentés par des députés fédéralistes, ils ne peuvent pas exiger d'eux d'avoir à l'esprit les seuls besoins du Québec. Le NPD ne sera pas une copie orange du Bloc, et c'est fort bien ainsi.