Depuis hier, une quarantaine d'organismes et individus défilent devant la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi 103. Ce projet de loi doit baliser le recours à une école privée non-subventionnée afin d'obtenir le droit de faire instruire ses enfants en anglais.

Depuis hier, une quarantaine d'organismes et individus défilent devant la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi 103. Ce projet de loi doit baliser le recours à une école privée non-subventionnée afin d'obtenir le droit de faire instruire ses enfants en anglais.

Bon nombre des témoins presseront le gouvernement Charest d'adopter une approche plus radicale, soit l'application de la loi 101 aux écoles non-subventionnées. En conséquence d'une telle mesure, les parents francophones et allophones n'auraient plus le droit d'envoyer leurs enfants dans une école anglaise non-subventionnée. À notre avis, le gouvernement doit rejeter cette option, notamment parce qu'elle pourrait violer nos obligations internationales.

Le jugement de la Cour suprême qui a mené Québec à rédiger le projet de loi 103 est un mauvais jugement. Mais, bon, il est là et l'Assemblée nationale doit amender la Charte de la langue française pour en tenir compte. L'avenue choisie par le gouvernement libéral diminuera sensiblement le recours au subterfuge de l'école non-subventionnée. Les quelques cas qui se faufileront à travers les mailles du filet ne menaceront pas l'équilibre linguistique actuel. Il faut rappeler qu'au-delà des chiffres et anecdotes dont les tenants de mesures draconiennes abreuvent l'opinion publique, les francophones constituent 80% de la population de la province; cette proportion n'a pratiquement pas bronché depuis 40 ans. Par contre, les anglophones, qui représentaient 13% de la population québécoise en 1971, ne sont plus que 8% aujourd'hui.

Les perpétuels inquiets trouveront toujours matière à nourrir leurs craintes. Ainsi, cette étude rendue publique mardi par l'Institut de recherche sur le français en Amérique au sujet des habitudes linguistiques des cégepiens de l'île de Montréal. On y apprend que les francophones et les allophones fréquentant les collèges anglais utilisent davantage la langue d'Arcade Fire dans leur vie quotidienne que ceux qui étudient en français. Ce phénomène est-il causé par un effet assimilateur des cégeps anglais ou les jeunes en question étaient-ils déjà portés vers l'anglais? L'étude ne permet pas de répondre à cette question.

Néanmoins, plusieurs y voient une raison supplémentaire pour interdire aux francophones et allophones l'accès aux cégeps anglais. Pourquoi s'arrêter en si bon chemin? Après les écoles primaires non-subventionnées et les cégeps, on voudra empêcher les francophones et allophones d'étudier à McGill et à Concordia. Il se peut qu'à coups de restrictions, la proportion de Québécois anglophones et allophones finisse par diminuer. Ceux-ci ne seront pas plus ou moins friands de culture française qu'aujourd'hui; ils auront tout simplement quitté ou boudé la province.

Parions que dans ce Québec «enfin» débarrassé de ses anglophones, il se trouvera encore des gens pour annoncer le déclin du français.