La hausse du fardeau fiscal annoncée par le budget Bachand a provoqué un tollé. «Le gouvernement pige dans les poches de la classe moyenne», déplore-t-on partout. Soit. Mais ceux, en particulier les partis politiques et les lobbys, qui dénoncent le budget ont le devoir d'expliquer comment, selon eux, on pourra financer la croissance des coûts des programmes sociaux.

La hausse du fardeau fiscal annoncée par le budget Bachand a provoqué un tollé. «Le gouvernement pige dans les poches de la classe moyenne», déplore-t-on partout. Soit. Mais ceux, en particulier les partis politiques et les lobbys, qui dénoncent le budget ont le devoir d'expliquer comment, selon eux, on pourra financer la croissance des coûts des programmes sociaux.

Pensons en particulier aux soins de santé, dont les coûts grimpent de plus de 5% par année, c'est-à-dire plus de 1 milliard. Certains affirment qu'il faut amincir la bureaucratie. C'est sans doute vrai. Cependant, même si on réduisait considérablement les lourdeurs bureaucratiques, on serait loin du compte. Les dépenses de l'administration centrale du système de santé québécois s'élèvent à 408 millions; c'est moins de 2% des dépenses totales du réseau.

Dans tous les pays développés, les coûts de la santé croissent aussi vite qu'au Québec; on ne peut donc pas tout mettre sur le dos du monstrueux organigramme du ministère de la Santé et des agences régionales.

Faisons payer les mieux nantis, soutiennent certains. Le problème, c'est que le Québec ne compte pas assez de «riches» pour payer toutes nos dépenses sociales. Les 190 000 Québécois qui gagnent 100 000$ ou plus versent déjà en moyenne 30 500$ chacun d'impôt sur le revenu. Pour obtenir d'eux le milliard additionnel que pompe le système de santé chaque année, il faudrait leur prendre une contribution supplémentaire de 5300$ année après année. Les conséquences sur la rétention du talent et sur la croissance économique seraient catastrophiques.

Le gouvernement Charest n'est pas le premier à faire face au problème que le budget Bachand prend à bras le corps. Lorsqu'elle était ministre de la Santé, Pauline Marois avait elle aussi constaté que, d'une façon ou d'une autre, les Québécois devraient payer davantage. Elle n'excluait alors ni le ticket modérateur ni la création d'un impôt santé spécifique.

Même si bon nombre de Québécois refusent de l'admettre, la croissance des coûts des programmes sociaux leur laisse seulement deux avenues: s'ils ne veulent pas payer davantage, ils devront laisser tomber de grands pans de ces programmes. Les garderies à 7$? Les congés parentaux 

Les choix imposés par l'impasse des finances publiques sont douloureux. Jusqu'ici, nos «choix de société» avaient consisté à ne pas choisir, à se donner les meilleurs programmes sociaux d'Amérique sans payer ce qu'il en coûte. Cette époque est révolue. Le réveil est brutal, mais nécessaire.