Outre le secret entourant les mesures visant à accommoder quelques écoles privées juives, beaucoup de gens s'opposent à ces changements pour des raisons de substance. Or, ces raisons ne sont pas fondées. Elles relèvent d'une tentative de laïciser non seulement l'État, mais toute la sphère publique pour reléguer la religion à la seule vie privée. L'objectif visé viole l'esprit et la lettre non seulement des chartes canadienne et québécoise des droits, mais aussi des textes internationaux.

Les écoles concernées rognent sur le temps consacré aux matières prescrites par le régime pédagogique pour réserver plus d'heures à la formation religieuse. L'entente conclue avec Québec prévoit que, dorénavant, ces établissements respecteront les normes imposées par le régime pédagogique. De plus, grâce à la possibilité d'enseigner le dimanche, les écoles pourront continuer de consacrer autant de temps qu'avant à la religion.

 

C'est là que le bât blesse aux yeux du Parti québécois, des centrales syndicales et de certains commentateurs. À leurs yeux, le seul règlement acceptable aurait été d'obliger ces écoles à réduire la place de l'enseignement religieux au profit des matières de base. On veut donc s'attaquer au droit fondamental des parents de donner à leurs enfants l'éducation de leur choix, dans des écoles privées, même si les établissements en question dispensent les cours exigés par le ministère de l'Éducation.

L'État doit être neutre face aux religions. Cependant, il n'a pas à empêcher l'enseignement d'une religion, quelle qu'elle soit, dans une institution privée. Il ne le fait pas en France, dont le modèle de laïcité fait l'envie de tant de personnes ici. Lors du débat sur la loi qui, depuis 1959, encadre l'enseignement privé, le premier ministre français de l'époque, Michel Debré, a rétorqué à ceux qui souhaitaient l'abolition des écoles confessionnelles: «Nous ne sommes plus à la fin du dix-neuvième siècle, où l'État luttait contre la religion pour être l'État.» C'est pourquoi la République subventionne les écoles privées à vocation religieuse.

Au cours des derniers jours, plusieurs se sont élevés contre l'«accommodement déraisonnable» consenti par la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne. Qu'y a-t-il de déraisonnable? Les écoles juives pourront donner des cours le dimanche; ça dérange qui? Les plus démagogues soutiennent que l'amendement au régime pédagogique mènera à l'école la fin de semaine pour tous les enfants. C'est faux. Il n'en a jamais été et n'en sera jamais question.

Ce n'est pas parce que la société québécoise, autrefois très religieuse, a vu la lumière de l'athéisme qu'elle peut priver de leurs droits fondamentaux les gens qui croient, qu'ils soient catholiques, musulmans ou juifs, «ultras» ou modérés.