Le nombre d'homicides a continué de diminuer aux États-Unis en 2009. Dans des grandes villes comme New York, Los Angeles et Washington, le nombre de meurtres a atteint son niveau le plus bas depuis les années 1960. Dans la capitale américaine, autrefois réputée comme la «capitale du meurtre», on déplorait 143 homicides l'an dernier; en 1993, il y en avait eu 454. À Los Angeles, il y a eu 314 homicides en 2009, 169 de moins qu'en 2006.

Aux États-Unis dans leur ensemble, le taux annuel d'homicide par 100 000 habitants a chuté de 9,8 en 1991 à 5,4 en 2008, et tout indique qu'il sera encore plus bas en 2009. Cette diminution impressionnante de nombre de meurtres suscite plusieurs interrogations, non seulement sur ses causes mais aussi sur l'interprétation qu'on fait, chez nous, de la même tendance au Canada.

Par exemple, on entend souvent dire que la baisse du nombre d'homicides au Canada s'explique par le contrôle de plus en plus serré exercé sur la vente et la possession d'armes à feu. Cette explication tient peut-être en partie mais elle est caricaturale. Depuis 1991, le taux d'homicide a baissé plus rapidement aux États-Unis (45% contre 32% au Canada), où les armes à feu sont encore en vente libre. Le taux d'homicide reste évidemment plus élevé chez nos voisins du Sud, mais l'écart diminue; au début des années 1990, il y avait, toutes proportions gardées, 7 fois plus de meurtres aux États-Unis qu'ici; en 2008, il y en avait 3 fois plus.

Aux États-Unis, les partisans de la peine de mort estiment que celle-ci peut freiner les élans meurtriers de certains individus. Pourtant, la baisse du nombre d'exécutions au cours des dernières années n'a pas eu pour effet d'augmenter la fréquence des homicides, au contraire. Dans l'état de New York et dans le District of Columbia, où le nombre de meurtres a beaucoup diminué, il n'y a eu aucune exécution depuis plus de trois décennies.

À New York et à Los Angeles, maire et chef de police se sont tout de suite attribué le mérite de la diminution de la criminalité violente. Il est possible que des tactiques policières améliorées et des augmentations d'effectifs aient contribué, en certains endroits, à l'amélioration de la situation. Mais là encore, il faut éviter les conclusions simplistes.

Plusieurs criminologues estiment que le principal facteur en jeu est le vieillissement de la population. La violence criminelle est surtout le fait des hommes jeunes. Comme ceux-ci sont relativement moins nombreux, il se commet moins de crimes violents.

D'autres éléments jouent sans doute. Le criminologue Marc Ouimet, de l'Université de Montréal, émet l'hypothèse qu'à la suite des attentats du 11 septembre 2001, l'accroissement des mesures de sécurité dans plusieurs lieux publics a pu avoir un effet dissuasif.

En outre, toujours selon M. Ouimet, contrairement à ce que l'on croit souvent, la criminalité violente baisse en temps de récession. Comme beaucoup de gens sont touchés par le ralentissement économique, un climat de résignation s'installe. Les périodes de forte croissance produisent plutôt un sentiment de frustration chez ceux que la prospérité laisse derrière, frustration qui est génératrice de violence.

Le criminologue suit depuis plusieurs années l'évolution des taux d'homicide au Canada aux États-Unis. Il a constaté que si les niveaux sont différents, les taux suivent les mêmes tendances à la hausse ou à la baisse depuis plus d'un siècle. Autrement dit, outre les lois et les tactiques policières, d'autres facteurs jouent, plus profonds et mal connus, facteurs que partageraient le Canada et les États-Unis, de même que des pays comme la France et la Grande-Bretagne, où le nombre de meurtres est également en baisse depuis plusieurs années.