«Il y a une différence entre la diligence raisonnable dont nous faisons preuve en demandant au gouvernement de rendre des comptes et la démagogie partisane», a déclaré la semaine dernière la députée libérale torontoise Carolyn Bennett.

Malheureusement, depuis l'arrivée au Canada de la deuxième vague de la grippe A(H1N1), les partis d'opposition à Ottawa et à Québec n'ont pas pu s'empêcher de verser dans la démagogie. Mme Bennett elle-même n'y a pas manqué en distribuant dans sa circonscription un pamphlet montrant un enfant autochtone avec un thermomètre dans la bouche, le tout coiffé du titre: «Pas de vaccin, seulement des sacs mortuaires.»

Un autre député libéral, Bob Rae, a accusé le gouvernement Harper d'être responsable de la mort des premières victimes de la grippe. M. Rae sait, bien sûr, que la grippe a fait des morts partout sur la planète. Il sait aussi que le vaccin est arrivé à peu près au même moment dans tous les pays qui ont entrepris une campagne massive de vaccination. Il devrait enfin savoir qu'ailleurs qu'au Canada (États-Unis, Norvège, Belgique, etc.), cette campagne a connu des débuts difficiles, en raison justement de son envergure inédite. Cela étant, le Canada ne semble pas s'en tirer moins bien que les autres pays. Alors accuser le gouvernement Harper d'avoir des morts sur la conscience...

À l'Assemblée nationale, le critique du Parti québécois en matière de Santé, Bernard Drainville, a mis ses talents d'orateur au service d'accusations grotesques contre le ministre Yves Bolduc. Par exemple, il a dénoncé le fait que «des centaines de milliers de doses de vaccin dorment actuellement dans des entrepôts du gouvernement du Québec». M. Drainville sait fort bien que ces doses ne «dorment» pas dans les entrepôts et sont acheminées le plus rapidement possible vers les centres de vaccination. «Aller le plus rapidement possible n'est pas suffisant», a soutenu la chef du PQ, Pauline Marois. Elle exige donc du gouvernement qu'il aille plus vite que ce qui est possible...

Le premier ministre, Jean Charest, a déploré le «ton très partisan» adopté par Mme Marois «sur un enjeu qui touche de si près chaque citoyen du Québec.» Le chef libéral a raison. Sauf qu'il est bien mal placé pour faire la leçon à ses adversaires. Lorsqu'ils formaient l'Opposition officielle, les députés libéraux s'étaient fait une spécialité de harceler les ministres péquistes de la Santé au sujet d'incidents isolés survenus dans des hôpitaux et des centres d'hébergement.

Bien sûr, le rôle de l'opposition est de s'opposer, de demander des comptes au gouvernement au nom de la population. Cependant, il y a une grande différence entre les critiques légitimes et les accusations gratuites. Les députés d'opposition devraient éviter de glisser vers les secondes, surtout dans un domaine aussi sensible que la santé publique. En succombant à la démagogie comme ils le font trop souvent, ils contribuent à miner la confiance des citoyens à l'endroit des autorités gouvernementales au moment même où cette confiance est primordiale.

Il y a dix jours, MM. Bolduc, Drainville et Khadir se sont fait vacciner ensemble pour donner l'exemple. Pour une fois, les politiciens mettaient l'intérêt public devant leurs intérêts partisans. Dommage que ça arrive si peu souvent.