La libération de Vincent Lacroix a provoqué une nouvelle levée de boucliers contre la règle qui permet la libération d'un détenu non violent après qu'il a purgé un sixième de sa peine. Dans le tollé qui a éclaté, tous les partis fédéraux ont proposé de revoir la procédure dite «d'examen expéditif» (PEE). Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a été le plus catégorique, réclamant l'abolition de cette procédure dès le premier jour de la reprise des travaux des Communes: «C'est très simple, ça se fait en deux temps, trois mouvements, si la volonté politique est là.»

Nous espérons aussi que les parlementaires s'attaqueront à cette question avec détermination et célérité. Il n'y a pas que les auteurs de crimes économiques qui bénéficient de ces libérations expéditives. C'est aussi le cas de plusieurs membres du crime organisé reconnus coupables de crimes sans violence, comme le blanchiment d'argent ou le trafic de stupéfiants. Chaque fois qu'un de ces truands quitte prématurément le pénitencier, la crédibilité du système judiciaire est entachée.

 

Agir avec précipitation dans ce domaine n'est toutefois pas une bonne idée. Les élus devront prendre en considération les effets d'une telle mesure, notamment sur l'augmentation de la population carcérale. Environ 800 personnes sont libérées chaque année au Canada après avoir purgé un sixième de leur peine. Les prisons étant déjà débordées, comment gérera-t-on cette clientèle supplémentaire?

L'abolition de la libération au sixième de la peine devrait, en toute logique, s'inscrire dans une réforme plus vaste des libérations conditionnelles. En 2007, un comité d'experts a recommandé l'élimination de toutes les libérations automatiques, soit à la fois celle prévue par le PEE et la libération aux deux tiers de la peine (la libération d'office). Selon le comité, «la mise en liberté arbitraire qui n'est pas accordée en fonction de la réadaptation est inefficace (...). Il faut exiger des délinquants qu'ils méritent leur retour dans la collectivité et qu'ils démontrent qu'ils ont changé et qu'ils sont capables de vivre en tant que citoyens respectueux des lois.»

Le gouvernement conservateur a accueilli favorablement le rapport du comité. Mais le projet de loi C-43, déposé en juin dernier, constitue une étape bien timide vers la mise en place d'un système fondé sur le principe de la «libération conditionnelle méritée.» Il faut aller plus loin, plus vite.

S'il y a un sujet sur lequel les partis fédéraux devraient être capables de s'entendre, c'est bien celui-là. Malheureusement, la récente montée de la tension partisane à Ottawa laisse peu d'espoir qu'une telle réforme, aussi essentielle soit-elle, puisse être lancée à court terme.

apratte@lapresse.ca