N’avez-vous pas l’impression d’assister à un accident de train au ralenti depuis que les Britanniques ont voté pour le Brexit en 2016 ?

Cette fois, c’est carrément le wagon de tête qui vient de dérailler. La première ministre Theresa May a annoncé qu’elle jetait l’éponge. Elle quittera officiellement son poste le 7 juin.

Elle démissionne parce qu’elle a été incapable de mettre en œuvre l’accord de divorce qu’elle avait négocié avec l’Union européenne. Plusieurs fois humiliée au cours des derniers mois, elle était prise entre deux feux. D’un côté : les députés qui refusaient de donner leur feu vert à l’entente – et qui l’ont formellement rejetée à trois reprises. De l’autre : les responsables de l’UE qui ne voulaient pas véritablement la modifier.

Il est tentant d’en faire un bouc émissaire et de l’accuser de tous les péchés. Mais ce serait faire fi du contexte dans lequel elle tentait de mener à bien ce divorce.

Sa performance comme première ministre n’a pas été reluisante, c’est vrai. Gouverner est un art qu’elle ne maîtrisait pas assez bien, de toute évidence. Même sa stratégie de la dernière chance dévoilée en début de semaine, qui prévoyait notamment la possibilité d’un second référendum, était maladroite et vouée à l’échec.

En revanche, avec les cartes qu’elle avait dans son jeu, on voit mal comment elle pouvait gagner.

Les Britanniques sont profondément divisés. Et parmi eux, ceux qui souhaitent quitter l’Europe veulent à la fois le beurre et l’argent du beurre. Comment s’entendre sur une solution négociée avec une telle attitude ?

Quant aux responsables de l’Europe, ils ont tout avantage à ne pas faciliter ce divorce. Leur objectif est d’empêcher que leur union ne se défasse encore un peu plus. Ils n’ont pas intérêt à donner des munitions aux europhobes et aux eurosceptiques disséminés sur le continent. Cette approche ne contribue pas non plus à une résolution de la crise.

La suite des choses dépendra principalement du politicien qui sera choisi pour remplacer la première ministre conservatrice. Le candidat favori est actuellement l’ancien maire de Londres et ex-ministre des Affaires étrangères : Boris Johnson.

Plusieurs se méfient de ce personnage haut en couleur. Il faut dire qu’il est tout aussi brillant et flamboyant que démagogue et clownesque. Il a beau avoir coupé ses cheveux, perdu du poids et s’être mis à pratiquer le yoga, « il n’a jamais montré le moindre signe qu’il est capable de faire face aux deux choses qui caractérisent le gouvernement moderne : un déferlement incessant de travail et l’exigence de faire des compromis complexes », selon The Economist.

Cet hebdomadaire britannique a souligné récemment le pari périlleux auquel s’expose non seulement le Parti conservateur, mais le pays de Winston Churchill au grand complet.

Boris Johnson dispose de qualités qui pourraient faire de lui l’homme de la situation, mais il possède aussi des défauts qui laissent croire qu’il sera un naufrageur de premier ordre.

Le ratage, jusqu’ici, est complet.

Boris Johnson peut-il vraiment faire pire ? Hélas, oui ! On pense par exemple à l’éventualité d’un « Brexit dur », soit un divorce sans accord. Ce serait vraisemblablement le plus mauvais scénario tant pour le Royaume-Uni que pour l’Europe.

En somme, le ratage est complet, mais il serait bon de retenir son souffle encore un peu. On ne le souhaite surtout pas, mais le pire reste peut-être à venir.

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