La question de l'âge en politique soulève à nouveau les passions. On l'a constaté la semaine dernière lors du Conseil national du Parti québécois. Le syndicaliste Marc Laviolette a carrément accusé les plus jeunes de vouloir « euthanasier toutes les vieilles sacoches » !

La question de l'âge en politique soulève à nouveau les passions. On l'a constaté la semaine dernière lors du Conseil national du Parti québécois. Le syndicaliste Marc Laviolette a carrément accusé les plus jeunes de vouloir « euthanasier toutes les vieilles sacoches » !

La question posée chez nos voisins du Sud est plus lourde de conséquences. Peut-on être trop vieux pour devenir président des États-Unis ? Des journalistes ont récemment affirmé que Bernie Sanders et Joe Biden ont fait leur temps et ne devraient pas se lancer dans la course à la Maison-Blanche.

Rien, pourtant, ne justifie une telle poussée d'âgisme.

L'âge du commandant en chef de la première puissance mondiale est un sujet de préoccupation légitime. Le choix du candidat à la vice-présidence est d'ailleurs crucial ; comme on le dit souvent, il va se retrouver « à un battement de coeur » de la présidence.

Mais vouloir empêcher certains candidats de se présenter en raison de leur âge, c'est faire preuve de condescendance à l'égard des politiciens qui pensent avoir ce qu'il faut pour descendre dans l'arène.

Les électeurs, pour leur part, devraient être libres de choisir le candidat qu'ils préfèrent, peu importe son âge. D'ailleurs, tant Bernie Sanders que Joe Biden se retrouvent dans le peloton de tête chez les démocrates.

Entendons-nous : les deux hommes ne sont pas des jeunots. Si Bernie Sanders remportait l'élection en novembre 2020, il deviendrait le plus vieux président élu pour un premier mandat. Il sera alors âgé de 79 ans. Quant à Joe Biden, il aura 77 ans le jour du scrutin. Le record appartient jusqu'ici à Donald Trump. Il a fait son entrée à la Maison-Blanche à l'âge de 70 ans (une note à son sujet : il n'était ni plus subtil ni moins arrogant lorsqu'il était plus jeune. L'âge n'a rien à voir !)

Les arguments présentés pour disqualifier les politiciens septuagénaires sont généralement irrecevables. « Le cerveau vieillit. Il ralentit. Il oublie », a soutenu le chroniqueur du Washington Post Richard Cohen, pour qui « Biden et Sanders ont attendu trop longtemps ».

« Les vieux, hommes et femmes, s'épuisent, mentalement et physiquement, malgré leurs efforts pour rester vigoureux et alertes », a pour sa part écrit le journaliste et historien Evan Thomas dans le même quotidien.

Pourtant, la science nous enseigne que la question ne peut pas être tranchée de façon aussi sommaire. « On ne peut pas généraliser. Ça va dépendre de la condition dans lesquelles les personnes se trouvent. Il est très possible qu'elles demeurent performantes à un âge avancé en dépit du déclin cognitif qui accompagne le vieillissement », souligne André Tourigny, médecin-conseil à l'Institut national de santé publique du Québec.

Et le déclin cognitif varie selon les individus, précise-t-il. Plusieurs facteurs entrent en jeu, dont la santé physique, les habitudes de vie et le niveau d'éducation.

Notons aussi, parallèlement, que l'espérance de vie en bonne santé est en augmentation presque constante depuis longtemps au sein des sociétés occidentales. Et que la santé physique ne se détériore pas, elle non plus, de la même façon chez tous les aînés.

Les politiciens plus vieux vont-ils être à coup sûr moins dynamiques ? Auront-ils moins d'énergie ? On sait pertinemment que ce n'est pas toujours une question d'âge.

On sait aussi que lorsqu'un candidat fait campagne, c'est comme s'il plongeait dans un bain de révélateur. On voit à peu près tout. Qualités et défauts. Et on constate généralement assez vite qui arrive à suivre ce rythme d'enfer et qui s'essouffle. Un exemple : Ronald Reagan, quand il a tenté de se faire réélire en 1984, a semblé embrouillé lors d'un débat contre Walter Mondale. Les électeurs l'ont néanmoins préféré au candidat démocrate.

Quant à la question des idées, là encore, la nuance est de mise. Preuve est faite qu'un candidat plus âgé peut malgré tout être en phase avec les jeunes. Aux États-Unis, Bernie Sanders a d'ailleurs toujours été particulièrement populaire chez les 18 à 34 ans. Inversement, un candidat plus jeune peut avoir des convictions qui ont dépassé leur date de péremption !

Les débats sur l'âge en politique ne sont pas futiles. Ni ici ni aux États-Unis. Le choc des générations est un phénomène inévitable.

Mais ces débats devraient être menés avec, en tête, deux enseignements mis en musique par George Brassens. « Les jeunes blancs-becs prennent les vieux mecs pour des cons. » C'est souvent le cas. Et par ailleurs, « quand on est con, on est con. Qu'on ait 20 ans ou qu'on soit grand-père ». Ça demeure, encore aujourd'hui, une vérité imparable.

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