« Ces chiffres sont une vraie bombe. »

C'est ce qu'a confié une source anonyme au quotidien Le Devoir, qui a révélé récemment que 27 écoles de la Commission scolaire de Montréal (la CSDM) allaient perdre quelque 3 millions de dollars, une somme qui était consacrée aux élèves les plus vulnérables.

La situation découle de la révision des indices de défavorisation du ministère de l'Éducation, qui a refait ses calculs à la suite du plus récent recensement. L'idée derrière cette initiative est de redistribuer les fonds aux écoles qui en ont le plus besoin.

Dans un monde idéal - si les besoins fondamentaux des élèves de toutes les écoles étaient comblés -, cette redistribution susciterait surtout des réactions positives partout dans la province. Elle n'aurait pas l'effet d'une bombe.

Or, les écoles de la CSDM sont loin d'être dans une situation idéale. Et celles qui vont perdre leurs fonds ne vont pas couper dans le gras. Elles vont devoir couper dans l'os.

Notons ici que ces fonds ne servent pas à payer les salaires des professeurs ou le chauffage dans les écoles. Ils sont utilisés spécialement pour venir en aide aux élèves défavorisés. Notamment pour ajouter des ressources pour ceux qui sont en difficulté. Des orthophonistes, des psychoéducateurs ou des techniciens en éducation spécialisée, par exemple.

Ces précieuses ressources, on en manque, hélas, depuis plusieurs années dans l'ensemble des écoles de la CSDM.

Selon une consultation menée par la commission scolaire et l'Alliance des professeures et professeurs de Montréal, il manquait l'an dernier l'équivalent d'environ 275 postes à temps plein pour aider les élèves « handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage ». Les chiffres pour l'année en cours seront disponibles sous peu, mais on ne s'attend pas à une nette amélioration de la situation.

Personne ne remet en question le fait que les fonds redistribués seront dirigés vers d'autres écoles, au sein d'autres commissions scolaires, qui en ont vraisemblablement encore plus besoin.

Certains se demandent si on ne devrait pas revoir la façon dont on calcule les indices pour obtenir une représentation plus fidèle de la situation sur le terrain. C'est peut-être souhaitable. Mais le problème le plus urgent à régler, c'est qu'on déshabille Pierre pour habiller Paul alors que Pierre est déjà à moitié nu !

Les échos en provenance du bureau du nouveau ministre de l'Éducation face à cette crise annoncée sont pour l'instant positifs. On reconnaît à Québec que si ces indices sont « de précieuses mesures », ils « ne disent pas tout ». Et on affirme vouloir établir des planchers de services dans les écoles. À défaut d'offrir une solution immédiate, ça démontre qu'on a compris ce qui cloche.

Ce n'est pas étonnant. Le ministre de l'Éducation Jean-François Roberge a une fine connaissance du milieu. Il sait fort bien que si toutes les écoles pouvaient s'offrir les ressources dont les jeunes les plus vulnérables ont besoin, la perte des sommes liées aux indices de défavorisation serait beaucoup moins douloureuse pour les établissements touchés.

Voyons voir, maintenant, comment il compte remédier au problème. Son parti a dit vouloir faire de l'éducation une priorité lors de la plus récente campagne électorale. Il doit maintenant passer de la parole aux actes.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion