Elsie MacGill, première diplômée en génie électrique au pays, était en lice l'an dernier pour figurer sur les nouveaux billets de 10 $. Elle n'a pas été retenue, mais le gouvernement fédéral vient néanmoins de lui rendre hommage... dans le cadre du « retour » du Canada en matière d'opérations de paix.

Lorsqu'il a annoncé le déploiement prochain de Casques bleus canadiens, Justin Trudeau a aussi lancé l'initiative Elsie, visant à faire grimper le nombre de femmes qui participent aux opérations de paix dans le monde.

Il s'agit d'un projet pertinent, mais embryonnaire. Et le gouvernement libéral aura fort à faire s'il souhaite honorer convenablement la mémoire de celle qui a joué un rôle clé - notamment - dans la fabrication d'un avion de chasse lors de la Deuxième Guerre mondiale. Car l'objectif de l'initiative Elsie ne sera pas facile à atteindre.

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Faire participer davantage les femmes aux opérations de paix dans le monde est une priorité des Nations unies. Elles estiment, avec raison, que le pourcentage actuel est insuffisant, tant pour ce qui est des forces militaires (un maigre 3,7 %) que des forces policières (9,5 %).

En 2015, une résolution a été adoptée à l'ONU selon laquelle ces taux doivent doubler d'ici 2020. C'est souhaitable. 

La présence de femmes lors d'opérations de paix peut avoir un impact significatif sur le terrain qui va au-delà de l'idée de mettre de l'avant l'égalité des sexes.

Les femmes peuvent contribuer de façon efficace à la résolution des conflits et peuvent devenir des modèles là où elles sont déployées, soulignent les Nations unies. Plus elles sont nombreuses, moins les femmes et les enfants des communautés locales hésiteront, par ailleurs, avant de signaler les agressions sexuelles commises par certains Casques bleus.

« Chez les Casques bleus, on peut s'attendre à ce que des femmes soient une force puissante pour l'élimination de l'exploitation et des abus sexuels », a d'ailleurs déclaré Justin Trudeau la semaine dernière.

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Fort bien, mais déployer deux fois plus de femmes dans le cadre d'opérations de paix est un défi majeur. Pour en prendre la mesure, il faut réaliser que ce ne sont pas les Nations unies qui recrutent les Casques bleus. Ceux-ci sont issus des forces armées de chacun des pays contributeurs aux opérations de paix.

Actuellement, les pays d'où proviennent le plus grand nombre de soldats sont, dans l'ordre : l'Éthiopie, le Bangladesh, l'Inde, le Rwanda, le Pakistan et le Népal. C'est donc auprès de ces nations et des autres grands contributeurs qu'il faudra agir. Avec tous les enjeux sociaux, culturels et religieux que c'est susceptible de soulever au sein de ces pays.

Agir d'abord pour que leurs forces armées recrutent un plus grand nombre de femmes et trouvent des moyens de les convaincre d'y rester. Ensuite pour aider ces pays à développer des mécanismes visant à s'assurer que les femmes militaires puissent être déployées dans le cadre d'opérations de paix.

Pour y arriver, Ottawa a promis un montant de 21 millions de dollars. C'est bien peu par rapport aux objectifs évoqués. 

Une partie servira d'ailleurs à mettre sur pied un fonds mondial dédié à cet effort piloté par le Canada.

Tout ça pour dire qu'il y a loin, très loin de la coupe aux lèvres. Pour que l'initiative Elsie soit plus qu'un voeu pieux, le gouvernement fédéral aura fort à faire. Même si ce combat est noble, il en sera un de longue haleine.

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Forces armées canadiennes

Nombre de total militaires : 92 787

Nombre de femmes : 14 016

Pourcentage de femmes: 15,1 %

Sources: ONU (octobre 2017) et Forces armées canadiennes (février 2017)

Les Nations unies estiment que le pourcentage actuel de femmes aux opérations de paix est insuffisant, tant pour les forces militaires (un maigre 3,7 %) que les forces policières (9,5 %).

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