«Ouragan social.» L'expression, utilisée par la ministre responsable de la condition féminine Hélène David, en dit long sur la tempête que traverse actuellement la société québécoise. Non seulement les premiers témoignages au sujet des inconduites sexuelles d'Éric Salvail ont-ils eu l'effet d'une bombe, mais ils ont aussi servi - c'était souhaitable - de catalyseur.

Parmi les autres changements positifs évoqués au cours de la dernière semaine, notons l'empressement avec lequel, à Québec, on veut maintenant implanter des cours d'éducation sexuelle dans toutes les écoles de la province.

S'il règne ces jours-ci une saine unanimité à Québec dans un dossier, c'est celui-ci. Grâce à l'«ouragan», tout le monde s'entend pour dire qu'il faut aller de l'avant plus rapidement, tant au primaire qu'au secondaire. Tant mieux.

Les architectes de la réforme scolaire du début des années 2000 ont erré en éliminant les cours de formation personnelle et sociale (FPS) sans veiller à remplacer, de façon formelle, l'éducation sexuelle qu'on y offrait aux jeunes.

Entendons-nous bien, le retour de ces cours ce n'est pas une solution magique. Il ne faut pas penser que les agressions sexuelles et les infections transmises sexuellement, notamment, disparaîtront. Mais l'impact des cours ne peut être que positif.

Quel paradoxe : nos enfants en apprennent vraisemblablement moins aujourd'hui à l'école sur la sexualité que leurs parents, alors qu'ils devraient être mieux outillés, les nouvelles technologies ayant bouleversé leur rapport à la sexualité.

Il y a deux ans, la Fédération autonome de l'enseignement estimait que «80% des écoles n'offraient pas le strict minimum en matière d'éducation à la sexualité». Pour remédier à cette situation intenable, un projet pilote a été lancé par le ministère de l'Éducation à l'automne 2015 dans une quinzaine d'écoles primaires et secondaires. Cette année, Québec indique qu'environ 200 établissements y participent. On parle de 5 à 15 heures d'enseignement par année scolaire.

La volonté politique est au rendez-vous. Mais le diable est dans les détails. Ce qu'on enseigne est crucial. D'autant plus que l'accès facilité à la pornographie a transformé, ces dernières années, la vision de certains jeunes par rapport à la sexualité. Les connaissances ne suffisent plus. Apprendre aux jeunes à les mettre en pratique et à modifier leurs comportements est essentiel. 

Ainsi, comprendre ce qu'est une agression sexuelle, c'est bien, mais c'est incomplet. Il faut également apprendre, par exemple, à intervenir lorsqu'on en est témoin.

La qualité de l'enseignement, par ailleurs, est primordiale. À ce sujet, le bilan effectué par le ministère de l'Éducation à la suite de l'an un du projet pilote est préoccupant. Certains ont déploré «les ressources financières insuffisantes pour bien supporter la démarche». D'autres ont sonné l'alarme quant au «niveau d'aisance» de certains enseignants.

Le ministère de l'Éducation aurait tout avantage à mieux se concerter avec différents acteurs qui voudraient collaborer au succès de ces cours. Certains estiment qu'on ne profite pas assez de leurs connaissances. Y compris les enseignants du primaire et du secondaire. Y compris, aussi, les diplômés en sexologie, qui sont prêts à participer à la formation des jeunes. Pourquoi se priver de leur expertise?

Oui, il faut accélérer l'implantation des cours d'éducation sexuelle. Les événements de la dernière semaine le confirment. Le moment est venu, pour Québec, d'y mettre le prix.

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