Un sur trois.

Le suicide compte pour le tiers des morts, depuis cinq ans, au sein des Forces armées canadiennes. C'est ce qu'a révélé notre journaliste Hugo de Grandpré hier à la suite de l'analyse de données obtenues par la Loi sur l'accès à l'information.

Le malheur, c'est que ces chiffres ne nous étonnent pas outre mesure. Le fait que les problèmes de santé mentale chez les militaires suscitent l'inquiétude, tout particulièrement depuis la mission en Afghanistan, est un secret de Polichinelle. L'armée continue pourtant depuis trop longtemps de souffler le chaud et le froid à ce sujet.

En novembre dernier, le médecin général des Forces armées canadiennes s'est penché sur la question. D'une part, son rapport a indiqué qu'il n'y a pas eu « d'augmentation statistiquement significative », des taux de suicide de 1995 à 2014 par rapport à ce taux, chez les hommes, dans la population canadienne.

D'autre part, on a découvert que les militaires qui ont déjà été déployés et ceux qui font partie de l'armée de terre - soient ceux qui sont en première ligne - ont plus de chances de mettre fin à leurs jours. C'est ce qu'ont démontré les taux annuels de suicide de 2010 à 2014.

Qu'en est-il des suicides chez les anciens combattants ? Question fondamentale... à laquelle Ottawa n'a pas encore de réponse. C'est déplorable.

Un rapport est toutefois prévu l'an prochain à ce sujet.

D'ici là, rappelons qu'une grande enquête du quotidien Globe and Mail a sonné l'alarme en décembre dernier. Ce reportage accablant a révélé qu'au moins 54 militaires ou anciens combattants ont mis fin à leurs jours après leur retour d'Afghanistan.

Le plus troublant, c'est que le ministère de la Défense sait, depuis plusieurs années, que le soutien offert à ceux et celles qui en ont besoin est déficient. Son ombudsman ne cesse de le lui répéter (le Vérificateur général a aussi fait des recommandations au sujet des services de santé mentale pour les vétérans en 2014).

Par exemple, l'Unité interarmées de soutien du personnel, qui offre des services dans une vingtaine d'établissements à travers le pays, n'arrive pas à le faire de façon adéquate. Ce réseau compte quelque 300 employés, mais on a évalué qu'il en faudrait 59 de plus. Et ceux qui y travaillent n'ont pas tous la formation souhaitée pour répondre aux demandes de façon appropriée.

Un autre rapport au sujet de ce réseau, rédigé à la demande du nouveau chef d'état-major de la Défense, sera publié sous peu. Espérons qu'il fera, cette fois, réagir Ottawa. L'actuel ministre de la Défense, Harjit Sajjan, a lui-même servi en Afghanistan et s'est dit préoccupé par les problèmes de santé mentale.

Il devra en faire la preuve, alors qu'il s'apprête à dévoiler sa nouvelle stratégie pour lutter contre le groupe État islamique. Les tâches des militaires canadiens, sur le terrain, pourraient se multiplier et se complexifier. On leur demande de jouer un rôle de premier plan dans la guerre contre le terrorisme, il ne faut pas les laisser tomber lorsqu'ils reviennent au pays.

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