Le Parti conservateur a sauté sur l'occasion. L'attentat terroriste au Burkina Faso lui permettait à nouveau, ont estimé ses députés, de braquer ses projecteurs sur les frappes canadiennes en Syrie, dont les libéraux ont annoncé la fin.

« Il faut maintenir la pression de toutes les manières possibles, entre autres, par le maintien des missions aériennes que nos aviateurs canadiens assument avec fierté et diligence », a affirmé le député Gérard Deltell, qui répétait en français ce que la chef de son parti, Rona Ambrose, avait soutenu un peu plus tôt.

Le drame a touché le Québec droit au coeur, six coopérants ayant été tués par des barbares qui ont ouvert le feu sur des civils innocents. Les proches des victimes expriment leur douleur et leur colère, avec raison. Mais les manoeuvres de récupération de la part de politiciens ne sont pas les bienvenues.

D'abord, répétons ce que nous avons déjà dit : des frappes doivent être menées en Syrie et en Irak pour vaincre le groupe armé État islamique. En revanche, ces frappes, seules, ne permettront pas d'éradiquer la menace terroriste au Moyen-Orient. Et encore moins sur le continent africain.

Il est donc acceptable et compréhensible que le Canada - dont les frappes compteraient pour moins de 3 % de toutes celles menées par la coalition internationale - songe à réviser sa stratégie.

Il est possible et souhaitable de laisser d'autres membres de cette coalition (dont de véritables puissances militaires) bombarder les djihadistes, si c'est pour se concentrer sur les autres volets d'une stratégie antiterroriste qui doit obligatoirement en comporter plusieurs.

Rappelons par ailleurs que les CF-18 canadiens bombardent toujours les djihadistes en Syrie et que cela n'a en rien permis d'éviter l'attentat au Burkina Faso.

Notons surtout que l'attentat a été revendiqué par Al-Qaïda au Maghreb islamique, filiale de l'organisation terroriste jadis dirigée par Oussama ben Laden. Ce groupe n'est pas celui qui est ciblé par la coalition internationale en Syrie et en Irak. C'est en fait un frère ennemi.

Ce nouveau front de la guerre contre le terrorisme qui vient de s'ouvrir prouve en fait qu'Ottawa a raison de vouloir diversifier ses méthodes et qu'il serait aussi bon de revoir les endroits où nous luttons contre les djihadistes. Le Canada ne pourrait-il pas jouer un rôle de premier plan dans certains pays africains ?

Si le gouvernement Trudeau doit être critiqué, c'est plutôt parce qu'il tarde à offrir les détails de sa stratégie.

Et parce que ni le premier ministre ni son ministre de la Défense n'ont réussi jusqu'ici à nous convaincre que cette lutte aussi complexe qu'essentielle est pour eux une priorité.

Le Canada est « assailli de toutes sortes de beaux projets, tant dans le domaine humanitaire que militaire », a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Dion. Fort bien, mais l'heure est venue de faire des choix.

Alors que les attentats se multiplient d'un bout à l'autre de la planète, les Canadiens ont besoin d'être rassurés. Ils veulent aussi connaître les détails de la stratégie du gouvernement Trudeau et savoir qu'Ottawa va agir rapidement.

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