L’été s’annonce chaud, et on ne parle pas de la météo. Trois fusillades ont eu lieu à Laval la semaine dernière. À Montréal, un homme a été abattu en plein jour dans le quartier Saint-Michel. Rien pour rassurer la population quand on sait que les incidents impliquant les armes à feu sont en hausse. Pour l’année 2021, on comptait 208 évènements impliquant des coups de feu à Montréal, soit 75 de plus que l’année précédente. Et, selon le SPVM, un évènement impliquant une arme à feu a eu lieu tous les deux jours depuis le début de 2022.

Les policiers nous disent que les jeunes criminels ne se comportent plus comme avant. « Ils sont impulsifs et désordonnés », a confié l’assistant-directeur aux enquêtes de la police de Laval, Jean-François Rousselle, sur les ondes de RDI il y a quelques jours. S’il y avait un certain « code de conduite » au sein des groupes criminalisés auparavant, il ne semble plus tenir aujourd’hui. On parle désormais de crime « désorganisé ».

Combien de temps avant qu’on revive une tragédie comme la mort des jeunes Meriem Boundaoui, Amir Benayad et Thomas Trudel, tous tués par balle ?

Non, la région métropolitaine n’est pas un « far west » comme certains l’affirment. Par contre, les citoyens ont raison de se poser des questions à propos de leur sécurité. Et ils sont en droit d’être rassurés.

La bonne nouvelle, c’est que les différents services de police de la grande région métropolitaine, ainsi que la Sûreté du Québec, semblent être en mode collaboration. C’est d’autant plus productif que les incidents ne connaissent pas les frontières des villes : plusieurs prennent naissance sur les réseaux sociaux. De plus, une intervention à Laval aura nécessairement des répercussions à Montréal et à Longueuil. Le temps est peut-être venu de mettre sur pied une force d’intervention plus officielle pour faire la lutte contre la violence armée et contre les guerres de gangs de rue.

Vendredi, les quatre chefs de police ont rencontré la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, pour parler de la stratégie à adopter pour l’été qui s’en vient. Elle semble très ouverte à leurs demandes. S’il manque de policiers sur le terrain, c’est le temps de lever la main et de réclamer des ressources supplémentaires. Québec a l’air réceptif, il faut en profiter.

L’Association des directeurs de police du Québec veut également agir sur le plan législatif.

Elle s’oppose en effet au projet de loi C-5, qui vise à modifier le Code criminel et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Rappelons que le gouvernement Trudeau s’était engagé à lutter contre la surreprésentation des Canadiens autochtones, noirs ou marginalisés dans le système de justice pénale. Comment ? En abolissant les peines minimales obligatoires (PMO) pour certaines infractions liées à la possession de drogue, d’armes à feu et de produits du tabac. Le projet de loi C-5 prévoit plutôt le recours à des peines purgées dans la communauté.

Les chefs de police craignent que le projet de loi envoie un mauvais message, mais la question des PMO est très complexe. Il n’y a pas de lien de cause à effet indiscutable entre la menace d’une peine sévère, d’une part, et la baisse de ce type d’infractions, d’autre part. Dans certains cas, cette menace peut avoir un effet dissuasif, mais ce n’est pas systématique. Plusieurs facteurs doivent être considérés et les conclusions sont loin d’être tranchées au couteau, comme le démontrent de nombreuses études.

D’ailleurs, beaucoup d’organismes, dont l’Association du Barreau canadien, sont en faveur du projet de loi C-5. Cela ne nous semble pas le bon clou sur lequel taper.

Nous croyons plutôt à la présence des forces policières sur le terrain, aux enquêtes, à des opérations comme Centaure, qui a permis des centaines de saisies d’armes depuis sa création. Et, surtout, nous croyons à la prévention dans les communautés. C’est une approche à privilégier, même si les résultats s’observeront à plus long terme.

La prévention est souvent vue comme une approche trop douce par les tenants de la ligne dure. C’est normal. Il faut du temps pour changer les mentalités et la culture policière. Mais l’idée fait son chemin. Le thème de la Semaine de la police, qui se poursuit jusqu’au 21 mai, est d’ailleurs « Mieux se comprendre : la police et le citoyen ». C’est aussi dans la qualité de cette relation que repose une partie de la solution à la lutte contre la criminalité.

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