Le ministre de l’Éducation Jean-François Roberge a pris un peu tout le monde par surprise : mercredi, il a semblé vouloir faire de l’équité dans les écoles publiques son nouveau cheval de bataille.

Il a déclaré qu’il voulait s’attaquer aux frais exigés aux parents pour les programmes particuliers dans ces écoles afin d’en « favoriser l’accessibilité ».

Un enfant ne devrait pas « être privé de s’inscrire » dans un de ces programmes « en fonction du revenu de ses parents », a-t-il dit.

Lisez « Québec veut s’attaquer aux frais exigés aux parents »

On comprend donc que Québec aura quelque chose à annoncer à ce sujet dans un avenir rapproché. Même si le diable est toujours dans les détails, saluons le fait que le ministre Roberge ait manifesté la volonté d’agir dans ce dossier.

Selon les chiffres du ministère de l’Éducation, il y a actuellement un peu plus de 450 000 enfants dans les écoles secondaires du Québec, dont tout près de 100 000 sont inscrits dans des programmes particuliers.

Parmi ceux-ci, trois sur quatre nécessitent une contribution financière de la part des parents, soit une large majorité.

On parle ici d’un vaste éventail qui va des programmes d’éducation internationale aux programmes de sport-études en passant notamment par de l’enrichissement en arts ou en informatique. Certains peuvent coûter très cher.

Plus d’équité ne serait pas un luxe. Le coût n’est toutefois pas le seul problème. Par conséquent, la gratuité de ces programmes ne serait absolument pas une panacée.

Car plus ces programmes se multiplient, plus ceux qui n’y participent pas peuvent se sentir stigmatisés ou démotivés.

L’école publique, au Québec, fonctionne de plus en plus à deux vitesses.

« Il y a une ségrégation qui se fait. Ça fait en sorte que les meilleurs élèves sont cloisonnés, séparés du reste du groupe. Je ne pense pas qu’on veut une société au Québec qui sépare les groupes comme ça », nous a dit le président de la Fédération des comités de parents du Québec, Kévin Roy.

En revanche, on peut comprendre ce qui pousse des centres de services scolaires et des établissements publics à opter pour de telles formules. Il est crucial pour eux de trouver des moyens de se démarquer pour assurer la rétention des meilleurs élèves, dont l’exode vers le privé s’accentuait encore récemment.

C’est un cercle vicieux, car le principe d’équité en éducation au Québec s’en trouve encore plus malmené.

En somme, le système scolaire dans son ensemble fonctionne désormais à trois vitesses.

Si vous n’avez pas assez d’argent ou si vous n’êtes pas assez doué, vous aurez de moins bonnes chances d’accéder à la vitesse supérieure. Celle où la motivation et le sentiment d’appartenance – qui feraient forcément, pour vous, une différence – sont davantage au rendez-vous.

Au privé, plusieurs écoles offrent des bourses aux élèves de familles à revenu modeste. Plusieurs estiment toutefois qu’elles devraient faire davantage de place aux enfants plus vulnérables sur le plan des apprentissages.

Au public, certains établissements ont déjà mis de l’avant des initiatives pour rendre leur système plus équitable. Un reportage de notre collègue Marie-Eve Morasse publié vendredi nous a appris qu’une école secondaire de Magog offre une concentration à TOUS ses élèves pendant leurs trois premières années.

On a carrément éliminé le programme régulier. Bref, on a nivelé vers le haut.

« Au-delà des résultats, l’ambiance de la classe est beaucoup plus agréable. Les jeunes répondent aux questions, embarquent dans les projets. Ça n’a pas nui aux plus forts et ça a aidé les plus faibles. Les élèves apprennent plus », lui a confié Manuel Cournoyer, qui enseigne le français à cette école secondaire.

Résultat : bonjour la mixité sociale, exit la stigmatisation.

Lisez « Des programmes particuliers pour tous »

On ne sait donc pas ce qui se trame à Québec, mais ce qui est clair, c’est qu’il existe déjà certaines pistes de solution au sein même du réseau.

Il y a une chose dont on peut être certain, par contre, c’est que peu importe les initiatives envisagées par le Ministère, ça ne règlera pas tout.

Comme bien d’autres, nous avons déjà soutenu que l’heure d’une profonde réflexion sur l’école au Québec est venue. Souhaitons que bon nombre d’élus inscrivent cette idée tout en haut du menu de la prochaine campagne électorale.

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