Emmanuel Macron a eu bien raison de rappeler à l’ordre ses partisans qui voulaient huer sa rivale Marine Le Pen. « Non, ne sifflez personne », a demandé le président français à la foule rassemblée au pied de la tour Eiffel pour écouter son discours de victoire.

Victoire, oui, sans aucun doute. Avec presque 59 % des voix, le président obtient un score fort honorable qui excède les prédictions des sondages les plus optimistes.

D’ailleurs, cette victoire de Macron dépasse les frontières de la France. C’en est aussi une pour l’Europe, pour l’Ukraine et, par ricochet, pour le Canada.

Malgré tout, on ne peut pas parler d’un triomphe pour le président qui se retrouve devant une France déchirée par les inégalités et une Europe déchirée par la guerre. Emmanuel Macron aura fort à faire pour recoudre les morceaux.

N’empêche, sa réélection est un bon signal pour l’Union européenne (UE), qui a du plomb dans l’aile depuis que le Royaume-Uni a décidé de faire cavalier seul, en 2020, avec son Brexit.

Même si Marine Le Pen ne prônait plus officiellement un retrait de l’UE, son positionnement en faveur de la souveraineté nationale se serait inscrit en porte-à-faux avec le droit européen.

De plus, son opposition au libre-échange, en général, aurait pu donner du fil à retordre aux exportateurs canadiens, notamment les éleveurs de bœufs que Mme Le Pen avait pris à partie lors du débat de la semaine dernière.

En reportant au pouvoir M. Macron, les Français ont donné leur appui à l’Europe et au libre-échange.

Mais on ne peut pas mettre sous le tapis le fait que Marine Le Pen a obtenu 41 % des votes – sept points de plus qu’à l’élection précédente – et que la majorité des Français (55 %) ont appuyé un parti de la gauche radicale ou de l’extrême droite au premier tour.

C’est un constat d’échec pour M. Macron, qui avait promis de contrer les dérives extrémistes.

Manifestement, le feu allumé par les gilets jaunes brûle toujours. Dans certaines régions, les institutions disparaissent une à une, laissant des déserts médicaux et éducatifs, ce qui crée un sentiment d’exclusion chez les citoyens qui ont une dent contre les décisions prises par les politiciens, à Paris.

Leur colère « doit trouver une réponse », a admis M. Macron dans son discours.

La réélection est aussi de bon augure pour l’Ukraine, qui a grand besoin de la solidarité que les alliés lui ont offerte depuis le début de l’invasion russe, il y a deux mois.

L’élection de Mme Le Pen aurait créé une dangereuse brèche dans cette unité qui a permis d’établir des sanctions économiques contre la Russie et de fournir des armes afin que les Ukrainiens résistent à l’attaque, tant bien que mal.

La proximité de Marine Le Pen avec le régime autoritaire et tyrannique de Vladimir Poutine est absolument renversante, elle dont le parti politique a contracté un prêt auprès d’une banque russe proche du pouvoir.

On espère qu’Emmanuel Macron, qui s’était présenté comme l’interlocuteur de prédilection de Vladimir Poutine, pourra reprendre ses efforts diplomatiques là où il les a laissés, il y a deux semaines, pour se concentrer sur sa campagne électorale.

La France occupant la présidence de l’Union européenne jusqu’en juillet, il en aura la légitimité. Et depuis l’époque du général de Gaulle, la France a toujours cherché à se positionner comme une puissance indépendante voulant maintenir l’équilibre entre la Russie et les États-Unis.

Son rôle de médiateur ne sera pas aisé, alors que les Russes intensifient le combat. La situation sur le terrain dictera les négociations, d’où l’importance d’appuyer l’Ukraine le mieux possible. Tout en gardant espoir dans la diplomatie.

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