Question-quiz. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) compte 38 pays. Du lot, lequel se dirige vers la plus faible croissance de son PIB par habitant d’ici 2060 ?

Non, ce n’est ni le Costa Rica, ni la Lettonie, ni le Japon, ni la Grèce. C’est le Canada.

Le constat, brutal, est décrit noir sur blanc dans le budget fédéral publié la semaine dernière. On aurait tort de rester les bras croisés en espérant que la boule de cristal se trompe.

D’autant que d’autres indicateurs, bien réels et actuels, sont inquiétants.

C’est le cas de notre productivité, qui traîne la patte depuis des décennies. En une heure de travail, un Canadien génère 58 $ US de richesse. Pendant la même heure, un Américain crée 77 $ US et un Irlandais, 110 $ US.

Ces chiffres ne devraient pas alarmer que les économistes. C’est la capacité de payer nos soins de santé, notre éducation et nos programmes sociaux qui est en jeu. Et avec la pénurie de main-d’œuvre, il devient encore plus nécessaire de faire plus avec moins.

Pourquoi produit-on moins de richesse qu’ailleurs ? C’est en grande partie parce que nos entreprises sont moins performantes et innovent moins. Leurs dépenses en recherche et développement sont au dernier rang des pays du G7 et sont presque trois fois moindres que la moyenne. Et pendant qu’elles augmentent ailleurs, elles diminuent ici.

Le dernier budget fédéral a le grand mérite de reconnaître le problème. Mais les solutions proposées, malheureusement, ne sont pas à la hauteur de cet immense défi.

Comment un État peut-il convaincre les entreprises privées d’innover ? S’il y avait une recette simple, elle aurait été appliquée.

Supergrappes industrielles. Programme d’aide à l’adoption du numérique. Soutien de la Banque de développement et d’Exportation et développement Canada. Le fédéral compte déjà sur une myriade de mesures.

Lesquelles fonctionnent et méritent d’être bonifiées ? Lesquelles doivent être abandonnées ? On cherche en vain les traces d’un tel exercice.

Le gouvernement a préféré opter pour ce que ses détracteurs surnomment la « stratégie sédimentaire » : ajouter des couches.

C’est ainsi qu’un Fonds de croissance du Canada et une Agence canadienne d’innovation et d’investissements s’ajoutent à la boîte à outils. Sur papier, ça paraît bien. Dans les faits, on a peu de détails sur ce que feront exactement ces nouveaux programmes et comment ils se distingueront de ce qui existe déjà.

Or, le gouvernement Trudeau ne s’est malheureusement pas illustré par sa capacité à bien gérer ce genre de structures. Le vérificateur général a montré que le programme d’infrastructures, doté d’une enveloppe de 188 milliards de dollars, est si mal suivi par le gouvernement qu’il est impossible de savoir s’il atteint ses objectifs.

Un autre dossier qui tourne en rond est celui du programme de crédits d’impôt à la recherche et au développement, qui engloutit chaque année environ 3 milliards de fonds publics. Ce programme ne semble pas tenir ses promesses et l’ancien ministre des Finances Jim Flaherty avait promis de le réformer… en 2012.

Or, le dernier budget promet une fois de plus d’« entreprendre un examen du programme ».

La stratégie sur les minéraux critiques, essentiels aux véhicules électriques, est plus claire et plus ciblée. Dans tous les cas, la volonté du dernier budget d’engager le Canada vers une « économie à faibles émissions de carbone » apparaît plus nécessaire que jamais.

Si le fédéral se retrouve à approuver un projet pétrolier comme Bay du Nord, par exemple, c’est surtout parce que l’économie de Terre-Neuve est beaucoup trop dépendante des hydrocarbures et qu’il n’y a rien d’autre pour créer de la richesse. C’est la même chose dans les Prairies.

Le gouvernement Trudeau a donc raison de dire qu’il faut doter le Canada d’une véritable économie du XXIe siècle. Il reste le plus difficile : trouver comment, et passer à l’action.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion