Si la pandémie a fait ressortir une question cruciale au Québec, c’est bien celle du logement des personnes âgées.

Pendant la première vague, les sigles CHSLD (centres d’hébergement de soins de longue durée), RI (ressources intermédiaires) et RPA (résidences privées pour aînés) sont devenus synonymes de nids d’éclosion.

Après deux ans de pandémie, près de 70 % des décès liés au virus sont survenus chez les résidants de ces lieux… même si seulement 9,5 % des Québécois de 65 ans et plus y vivent.

Cela force des réflexions. Des aînés, il s’apprête à y en avoir beaucoup au Québec. Où logeront-ils ? Comment pourrons-nous leur fournir un environnement non seulement sûr, mais aussi agréable et stimulant ?

À cette question, méfions-nous des réponses simples. Ne serait-ce que par l’ampleur du choc démographique qui nous attend, il est évident que les solutions devront être multiples.

Surtout, chaque aîné a sa réalité, ses besoins, sa vision de l’environnement où il souhaite vieillir.

Ces choix, on devra être en mesure de les offrir.

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De nombreuses études l’ont montré : le Québec n’investit pas assez dans le soutien aux personnes âgées (1,3 % du PIB dans la province, contre 1,7 % dans la moyenne de l’OCDE, 1,9 % en France, 2,5 % au Danemark et 4,7 % aux Pays-Bas).

Du lot, le Québec consacre une part plus faible de ces sommes au soutien à domicile. Un rattrapage est en cours, mais il ne suffit pas à compenser la hausse des besoins1.

Il est donc clair que les soins à domicile représentent un gros morceau du casse-tête.

Cela dit, malgré la mauvaise presse que les résidences privées ont essuyée depuis deux ans, on ne peut pas les mettre au rancart. Ce serait comme jeter grand-papa avec l’eau du bain.

Il restera toujours des personnes âgées qui voudront profiter d’un programme d’activités sociales, qui cherchent la sécurité d’une infirmière sur place en tout temps, qui préfèrent se faire servir trois repas par jour plutôt que de cuisiner.

Or, une catégorie bien précise de ces RPA est en grande difficulté : les plus petites.

Entre 2009 et 2019, plus de la moitié des RPA de neuf unités ou moins ont disparu au Québec. Le gouvernement a multiplié les programmes d’aide pendant la pandémie pour freiner l’hécatombe. Malgré cela, les fermetures et conversions se sont accélérées.

Les grosses résidences parviennent à compenser les unités perdues. Mais la saignée qui frappe les plus petites résidences prive les aînés de places souvent moins chères et à proximité de leur milieu de vie.

Les gestionnaires de ces résidences affrontent une tempête parfaite. En pleine pénurie de main-d’œuvre, et alors que le gouvernement a augmenté la rémunération des employés de la santé, ils peinent à recruter. Ils doivent répondre à des normes sans cesse plus strictes. Et les assureurs délaissent le secteur, perçu comme trop risqué.

Comment les aider ? Louis Demers, professeur à l’ENAP, a mené 32 entrevues auprès de propriétaires de RPA. Le mot « paperasse » est revenu… 116 fois dans leurs propos.

Au fil des ans, et pour les meilleures raisons du monde, le gouvernement a imposé de plus en plus de contraintes aux RPA (gicleurs obligatoires, rapport à remplir au moindre évènement, etc.) Le temps est venu de voir comment donner un peu d’oxygène aux propriétaires sans compromettre la sécurité et le bien-être des résidants. Parce que la vérité est qu’on aura besoin d’eux.

« Un petit chez-soi vaut mieux qu’un grand chez les autres », dit le proverbe. Que ce chez-soi s’appelle la maison familiale, le RPA ou le CHSLD, nos aînés doivent avoir les moyens de s’y sentir… chez eux.

1. Consultez l’étude de l'Institut du Québec Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion