La lecture du plus récent rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) ne vous remontera pas le moral.

Pendant qu’une partie de l’Australie est inondée, et que les braises sont à peine refroidies en Colombie-Britannique, les quelque 270 experts qui signent ce document brossent un portrait de l’avenir qui attend nos enfants et nos petits-enfants. Et cet avenir, il est plus orange vif et noir que rose.

Cela ne devrait pas nous surprendre. Ce qui, auparavant, semblait de lointaines menaces, voire le scénario tiré par les cheveux d’un film catastrophe, se déroule désormais sous nos yeux : chaleurs extrêmes, sécheresses, incendies, érosion des côtes, perte de la biodiversité, espèces animales en voie de disparition, pollution de l’air, montée de la crue des eaux… Nous sommes déjà témoins de tout ça au quotidien. Or, malgré le bruit assourdissant des sonnettes d’alarme, nous continuons de faire la sourde oreille.

Ce que nous dit ce rapport du GIEC, qui détaille les conséquences des changements climatiques pour chaque partie du monde, c’est que ça n’ira pas en s’améliorant. Nos efforts ne font pas le poids face au réchauffement de la planète. Et comme la vie est souvent injuste, ce sont les plus pauvres, ceux qui consomment et polluent le moins, qui souffriront davantage.

Au cours des prochaines années, il faudra donc s’attendre à voir s’amplifier des mouvements de réfugiés climatiques avec la déstabilisation politique, sociale et économique qui vient avec.

En ce qui concerne plus précisément l’Amérique du Nord, les experts du GIEC identifient plusieurs impacts concrets : problèmes d’approvisionnement et de sécurité alimentaire, inondations, pénuries d’eau, conséquences économiques dans les grands centres urbains… Leur rapport identifie un autre effet que nous avions peut-être sous-estimé : les répercussions de ces bouleversements sur notre santé mentale. En effet, l’insécurité fera son travail sur nos esprits peu habitués à l’adversité, si on se compare à certaines populations d’Afrique ou d’Asie du Sud-Est.

Ce rapport – que le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, a qualifié d’« atlas de la souffrance humaine » – est le plus précis et le plus inquiétant de tous les rapports publiés par le GIEC jusqu’ici. Or, force est de constater que malgré les nombreux avertissements, le message ne passe toujours pas.

En 2019, le Brookings Institute identifiait des facteurs qui font obstacle à la lutte contre les changements climatiques : le manque de confiance de la population à l’endroit des gouvernements, le manque d’éducation scientifique, l’absence de conséquences pour les entreprises polluantes…

Les auteurs du GIEC identifient un autre facteur qui fait des ravages en Amérique du Nord : la désinformation. La négation des changements climatiques, le refus de reconnaître l’action de l’être humain ainsi que toutes les théories fumeuses colportées au fil des ans par les climatosceptiques sont autant d’obstacles à l’action environnementale.

« La désinformation et la politisation des enjeux climatiques sont des freins à l’adoption de mesures concrètes qui pourraient faire une différence », insistent les experts. Et la défense de droits acquis contribue à nier l’urgence de la situation.

Ajoutons à cela qu’en politisant la lutte contre les changements climatiques, les négationnistes de l’urgence climatique imposent une vision tordue et binaire de la réalité : vous êtes proécologie, critique de la consommation à outrance et de l’utilisation de l’auto ? Vous voilà étiqueté élitiste, militant go-gauche anti-croissance économique et empêcheur de tourner en rond.

À l’autre bout du spectre politique, il semble que le choix de conduire un véhicule polluant (les camions légers représentaient 71 % des véhicules vendus en 2020 !), de surconsommer, de prendre l’avion à outrance et de contribuer à l’étalement urbain soient devenus des droits individuels fondamentaux qu’on ne peut plus remettre en question de peur de se voir étiqueter « ennemi du peuple ». Nous caricaturons à peine.

Voilà le résultat de la politisation des enjeux climatiques. Une vision manichéenne du monde qui empêche d’avancer et qui risque de nous mener à notre perte.

La lutte contre les changements climatiques devrait pourtant être un objectif partagé par tous les partis politiques, peu importe leur position idéologique. C’est notre survie comme espèce qui en dépend, rien de moins. Il y a encore cinq ans, écrire cela aurait semblé dramatique. Aujourd’hui, cela relève simplement du gros bon sens.

On ne s’est jamais demandé si vouloir soigner un cancer était de droite ou de gauche, progressiste ou conservateur. Il devrait en être de même quand vient le temps de soigner la planète.

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