La menace nucléaire vient d’être brandie, brutalement, par Vladimir Poutine. Une démonstration de force destinée à frapper les esprits des Russes tout autant qu’à apeurer et à intimider ses rivaux.

Pourtant, ce à quoi on assiste depuis quelques jours démontre qu’à peu près personne, au sein des démocraties occidentales, n’a l’intention de se laisser intimider.

Le président russe nous met le couteau sur la gorge ?

On en prend acte et… on lui fait comprendre que ce chantage ne nous fera pas faiblir dans notre défense de l’Ukraine.

« La seule façon de passer à travers [cette crise], c’est de rester fermes et unis, et de démontrer à Vladimir Poutine qu’il a fait une erreur horrible, qu’il a fait un mauvais calcul et qu’il va devoir reculer devant l’unité et la fermeté des pays dans le monde », a résumé Justin Trudeau lundi.

Il venait d’annoncer que le Canada allait expédier des armes antichars et des munitions en Ukraine.

La veille, ses ministres Mélanie Joly et Anita Anand avaient quant à elles promis à l’Ukraine pour 25 millions de dollars d’équipement militaire non létal.

Verdict : les menaces de Vladimir Poutine ont eu l’effet inverse de ce qu’il souhaitait.

L’exemple le plus frappant est celui de l’Union européenne, qui a débloqué dimanche, dans la foulée des remarques du président russe, l’équivalent d’environ 650 millions de dollars pour armer l’Ukraine.

Du jamais-vu.

« Pour la première fois, l’Union européenne va financer l’achat et la livraison d’armements et d’autres équipements à un pays victime d’une guerre. C’est un tournant historique », a déclaré la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

On a aussi observé un tournant majeur en Allemagne. Le pays ne livre généralement pas d’armes létales dans les zones de conflit depuis la Seconde Guerre mondiale, mais a annoncé qu’il rompait avec cette doctrine pour aider l’Ukraine.

De fait, c’est probablement en raison de la fermeté affichée par les démocraties occidentales – jumelée à la résistance étonnante et à la bravoure des Ukrainiens – que Vladimir Poutine a dû se résoudre à agiter si rapidement l’épouvantail nucléaire.

Non, les États-Unis, l’Allemagne, la France, le Canada et les autres alliés de l’Ukraine ne vont pas, jusqu’à nouvel ordre, se battre en Ukraine.

Ce serait perçu par la Russie comme une déclaration de guerre en bonne et due forme.

Et Dieu seul sait jusqu’où une nouvelle guerre mondiale pourrait nous mener…

Mais la riposte des démocraties occidentales n’est pas molle pour autant.

Même qu’elle a probablement pris le régime russe par surprise.

Tout porte à croire que Vladimir Poutine pensait pouvoir humilier l’Occident (une fois de plus) en renversant rapidement le gouvernement ukrainien et en achevant la conquête débutée en 2014 avec l’annexion de la Crimée.

Il misait, c’est certain, sur l’apathie de nos démocraties. Elles ont multiplié les accommodements à l’égard des tyrans ces dernières années.

La Russie serait-elle en train de réveiller un géant endormi ? À tout le moins momentanément, oui.

Et il n’y a pas que les livraisons d’armes qui inquiètent et irritent Moscou.

L’Europe, les États-Unis, le Royaume-Uni et le Canada ont mis en place « les sanctions les plus sévères jamais imposées à une grande économie », a indiqué la vice-première ministre canadienne, Chrystia Freeland.

Parmi les mesures les plus dures : les pays occidentaux se sont mis d’accord pour exclure les principales banques russes du système interbancaire Swift. Ils ont aussi, pour plusieurs, interdit les transactions avec la banque centrale russe.

Pour le régime russe, financer la guerre pourrait finir par devenir plus difficile.

Soyons clairs : ça ne signifie pas que Vladimir Poutine sera mis en échec, même si on le souhaite ardemment.

Mais il est rassurant de voir que le Canada et les autres démocraties occidentales ont compris qu’il était crucial de prouver à Vladimir Poutine que sa guerre stupide et atroce ne resterait pas impunie.

Crucial de lui montrer que nous allons soutenir l’Ukraine – et, par conséquent, la démocratie – avec force.

Crucial, enfin, de lui faire comprendre que s’en prendre aussi odieusement à l’Ukraine lui coûtera cher.

Très cher.

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