Il y a, dans le discours des manifestants qui ont pris d’assaut Ottawa, une contradiction aussi étourdissante que le son des klaxons que les camionneurs font résonner avec un enthousiasme juvénile.

Ces manifestants s’opposent à la vaccination obligatoire des camionneurs transfrontaliers ET ils réclament la fin de toutes les mesures sanitaires.

Pourtant, la meilleure façon de faire disparaître ces mesures, c’est… de se faire vacciner.

Justin Trudeau l’a souligné lundi lors de sa rencontre avec la presse.

C’était ce qu’il fallait dire.

Hélas, ça ne donnera absolument rien.

On a désormais compris que personne ne fera entendre raison à ces manifestants, dont certains promettent maintenant de rester à Ottawa « jusqu’à ce que le premier ministre Trudeau soit parti ».

Impossible de négocier avec eux.

Leurs revendications sont tellement vastes – et fantaisistes – qu’on ne sait plus trop ce qui les contenterait.

Un peu plus et ils réclameraient la fin de la pandémie…

C’est ce que tout le monde souhaite. Mais on aura beau être des millions dans les rues à hurler pour que ce virus disparaisse du jour au lendemain, ça n’arrivera pas.

Une partie de la colère des manifestants est légitime, bien sûr.

Rares sont ceux qui s’accommodent, avec le sourire, des confinements et autres mesures imposées au nom de la santé publique.

La large, très large majorité des citoyens d’un bout à l’autre du pays en comprend toutefois l’utilité, même si la grogne augmente au fil des semaines.

Les camionneurs réunis à Ottawa s’estiment stigmatisés. Tout comme les autres manifestants venus les soutenir. Ils n’ont pourtant pas le monopole du ras-le-bol.

On peut comprendre leur désarroi, mais ce sont de faux martyrs.

Au jeu des comparaisons, ils ne font pas très bonne figure.

Les vrais martyrs sont plutôt ceux qui ont vu des proches mourir de la maladie.

Ceux, aussi, qui ont perdu leur emploi et commencent à perdre de vue la lumière au bout du tunnel.

Ou encore ceux dont la vie a été chamboulée de façon telle qu’ils n’arrivent pas encore à retrouver leur équilibre.

Que dire, enfin, de tous les travailleurs de la santé qui portent le réseau à bout de bras ?

Il est d’autant plus difficile de plaindre les manifestants que ceux qui refusent de se faire vacciner sont responsables, d’une façon disproportionnée, du débordement de nos hôpitaux, en particulier des unités de soins intensifs.

Et mettons-nous à la place, un petit instant, d’autres véritables martyrs : ceux dont les interventions chirurgicales ont été reportées… et qui entendent ces manifestants s’obstiner à diaboliser les vaccins.

Difficile de faire preuve de compassion à l’égard de ceux dont l’irresponsabilité est à la source de ton calvaire.

Difficile, par ailleurs, de passer l’éponge sur les dérapages de certains manifestants au cours de la fin de semaine.

On ne fera pas de démagogie. On ne prétendra pas que les évènements ont eu une quelconque ressemblance avec l’insurrection du 6 janvier 2021 à Washington, même si certains avaient craint un tel scénario.

N’empêche, les croix gammées, les drapeaux confédérés, les monuments profanés et les manifestations de haine et d’intolérance sont autant d’écarts de conduite qui nous font comprendre que la colère des camionneurs a été instrumentalisée.

Ces dérapages nous font souhaiter que la manifestation prenne fin au plus vite (comme d’ailleurs les résidants d’Ottawa, qui n’en peuvent déjà plus).

Les seuls qui, dans la capitale fédérale, défendent encore les manifestants avec zèle sont les élus conservateurs.

Suggestion : pourquoi ne profiteraient-ils pas de cette relation privilégiée (et malsaine) avec les protestataires pour les convaincre de déguerpir au plus vite ? Pour une fois, ils feraient œuvre utile dans ce dossier !

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