Après François Legault dans le rôle du bad cop, voici Lionel Carmant dans celui du good cop.

C’est l’une des meilleures façons de résumer la stratégie actuellement déployée par le gouvernement du Québec pour inciter les non-vaccinés à retrousser leurs manches.

Deux semaines après que le premier ministre eut annoncé son intention d’imposer une contribution santé à ceux qui refusent de se faire vacciner, voici que son ministre Lionel Carmant leur tend la main.

Et c’est absolument… ce qu’il fallait faire !

Il est logique d’avancer étape par étape.

Il importe encore de tout mettre en œuvre pour convaincre ceux qui n’ont pas encore reçu de première dose. Cela relève de l’obligation morale.

Parmi les adultes, il y en a environ 540 000. C’est encore trop.

Ces Québécois sont surreprésentés parmi les patients hospitalisés en raison de la COVID-19. Et ils représentent environ la moitié de ceux qui se retrouvent aux soins intensifs.

Comme l’a dit Lionel Carmant, « chaque dose donnée va être un gain ».

Notons d’ailleurs que le ton bienveillant du ministre sur cette question cadre parfaitement avec l’aspect « positif » de l’approche mise de l’avant.

Il cadre avec l’idée, aussi, qu’il est primordial d’établir une relation de confiance avec les Québécois qui n’ont pas encore reçu de première dose.

Ceux-ci ne sont pas tous d’irréductibles ennemis des vaccins qui s’abreuvent aux théories du complot relayées par les réseaux sociaux au détriment de la santé publique.

Trois groupes ont été identifiés par Québec.

D’abord ceux qui refusent de se faire vacciner.

Ensuite la population « marginalisée », par exemple pour des questions de barrières linguistiques, dans le cas de communautés culturelles, ou de littératie.

Enfin les Québécois les plus vulnérables.

L’accès aux vaccins pour ces deux derniers groupes est souvent difficile, pour toutes sortes de raisons valables.

Lisez notre reportage à ce sujet

L’approche positive du ministre signifie pour ainsi dire qu’il a l’intention de traiter les non-vaccinés aux petits oignons.

Pour l’essentiel : aller à leur rencontre et tenter de les rassurer.

On a notamment annoncé la création d’une ligne téléphonique où des professionnels de la santé pourront répondre aux questions de tous ceux qui hésitent encore à se faire vacciner.

Mais surtout, des cliniques éphémères seront implantées au cours des prochaines semaines à certains endroits, à Montréal et ailleurs au Québec, où l’on retrouve une plus forte proportion de non-vaccinés.

Ce n’est pas inédit.

Plusieurs acteurs importants du milieu philanthropique québécois ont parrainé l’an dernier des initiatives de sensibilisation à la vaccination sur certains territoires où les non-vaccinés étaient nombreux. Leurs expériences – qui ont notamment pris la forme des brigades vaccinales dont parle Québec solidaire –, couronnées de succès, ont démontré que le milieu communautaire doit être mobilisé.

Le ministre Carmant aurait tout avantage à s’inspirer de ce modèle, qui a porté ses fruits l’an dernier.

Il serait sage d’y injecter les fonds nécessaires et de faire appel aux leaders communautaires.

Ce que Québec aurait dû faire plus tôt, d’ailleurs.

Car à l’automne 2021, le financement privé des initiatives en question a pris fin et les acteurs impliqués ont tenté de convaincre Québec de prendre le relais… en vain.

On aurait pourtant dû saisir la balle au bond et poursuivre ces efforts. Il est vrai, cependant, qu’Omicron n’était pas encore dans le portrait.

La stratégie de vaccination du ministre Carmant va de pair avec le déploiement de nouvelles mesures incitatives. Notamment l’obligation de présenter son passeport vaccinal, depuis lundi, dans les magasins à grande surface.

Le ministre Dubé a d’ailleurs fait remarquer que le même jour, plus de 3000 personnes ont obtenu leur première dose. C’est « au moins le double » de la journée précédente, a-t-il déclaré mardi.

Ne soyons pas dupes, cela dit. Le bad cop prendra inévitablement la place du good cop dans les prochaines semaines. La CAQ devrait offrir sous peu les détails de la contribution santé annoncée.

Car si la méthode douce est actuellement employée par Québec pour convaincre les non-vaccinés de se protéger contre la COVID-19, c’est aussi vraisemblablement parce qu’il sera plus facile, après coup, de justifier l’emploi de la méthode forte.

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