Vous souvenez-vous du fantôme des Noëls passés ?

Celui qui, dans le Conte de Noël (de Charles Dickens), vient hanter le vieux Ebenezer Scrooge.

Le fantôme montre à ce vieil avare bougonneux à quel point il a pris, autrefois, de mauvaises décisions.

Aux États-Unis, les républicains sont aux prises avec le fantôme… de l’élection passée.

PHOTO MANDEL NGAN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

La purge n’aurait pas eu lieu si Donald Trump n’en menait pas aussi large, écrit notre éditorialiste.

Il est personnifié par Donald Trump.

Et il réveille bon nombre de mauvais souvenirs.

Il n’a, en fait, jamais cessé de hanter son parti depuis sa défaite. Ceux qui en doutaient n’ont qu’à constater avec effroi ce qui vient de se passer chez les républicains au Congrès américain pour s’en convaincre.

PHOTO JONATHAN ERNST, REUTERS

Liz Cheney s’adresse aux journalistes après avoir été destituée de ses fonctions de numéro 3 à la Chambre des représentants, à Washington, le 12 mai.

On vient de faire perdre à Liz Cheney – fille de l’ancien vice-président Dick Cheney – son poste de numéro 3 du parti à la Chambre des représentants.

La purge n’aurait pas eu lieu si Donald Trump n’en menait pas aussi large.

Elle n’aurait probablement pas eu lieu non plus si la théorie du complot au sujet de l’élection de novembre n’avait pas été popularisée avec une telle efficacité par l’ancien président et ses plus fidèles alliés.

Enfin, elle n’aurait pas eu lieu si la majorité des républicains à Washington n’avait pas décidé que la meilleure façon de calmer le jeu au sein de leur parti est d’étouffer toute dissidence. De censurer, par conséquent, tous ceux qui refusent de cautionner les allégations mensongères de Donald Trump selon lesquelles le scrutin de 2020 était truqué.

Car tel est le plus grand des péchés de Liz Cheney aux yeux des républicains : elle s’obstine à dire qu’il faut cesser de mettre en doute la légitimité de cette élection.

Elle a raison. Mais Donald Trump ne veut rien entendre. Et la façon dont on vient de la traiter est un message qu’on lance à tous ceux qui seraient tentés de l’imiter.

La purge n’est d’ailleurs pas terminée. Prochaine étape : le clan Trump va tout faire pour tenter d’empêcher Liz Cheney de se représenter aux prochaines élections. Pour lui faire perdre la chance de conserver son siège d’élue du Wyoming à Washington.

Certains ont signalé qu’au Québec, il y a de quoi se réjouir de voir que le poste de numéro 3 de la Chambre des représentants sera probablement occupé par une de nos voisines.

Elise Stefanik, dont la circonscription se trouve dans le nord de l’État de New York, est pressentie pour ce poste convoité.

> Lisez l’article de Richard Hétu

Si jamais les républicains s’emparaient de la Chambre des représentants au cours des prochaines années et si Elise Stefanik continuait de gravir les échelons jusqu’à en occuper la présidence, nous pourrions compter sur une alliée de taille au Congrès américain.

Il y a loin de la coupe aux lèvres, mais c’est une possibilité.

Cela dit, ne laissons pas ce scénario nous faire perdre de vue la situation dans son ensemble. La tournure des évènements à Washington demeure troublante.

Liz Cheney avait affirmé qu’elle était au cœur d’une bataille pour « l’âme » du Parti républicain. Elle a entièrement raison. Et son échec cuisant a de quoi nous inquiéter à la fois en ce qui concerne l’avenir de la formation politique et en ce qui concerne celui de la démocratie américaine.

Se positionner du bon côté de l’histoire, défendre les faits, la vérité et les institutions démocratiques, c’est désormais l’équivalent de s’asseoir sur un siège éjectable chez les républicains.

Les élus ne cherchent pas à freiner la radicalisation de leur parti et de ses membres, ils l’encouragent.

Ils ne tentent pas de désamorcer le grand mensonge de Donald Trump, ils le soutiennent. Et cette théorie du complot est une bombe à retardement.

En somme, le fantôme de l’élection passée n’a assurément pas fini de faire des ravages.

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