Pour de nombreux Québécois, le choc de l’annonce sera brutal. Notre collègue Denis Lessard nous apprend que face à une épidémie désormais considérée comme « hors de contrôle », François Legault planifie un confinement total du Québec de trois à quatre semaines.

La recommandation vient de la Santé publique, qui plaide pour l’imposition d’un couvre-feu de surcroît.

De la frime pour secouer les Québécois ? Non. Ces recommandations sont à prendre au sérieux. Le Royaume-Uni vient de replonger en confinement. Et dans certaines régions de la France, un couvre-feu sera bientôt imposé le week-end à… 18 h.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

« C’est un véritable électrochoc que s’apprête à servir le gouvernement aux Québécois. Difficile, maintenant, de ne pas comprendre le message : la situation est sérieuse, et l’hiver sera long », écrit notre éditorialiste.

Le gouvernement voit planer le spectre du cauchemar qu’a vécu le nord de l’Italie au printemps : celui de devoir choisir quels patients auront accès aux respirateurs. Personne ne veut se rendre là.

Qu’on se dirige vers un confinement total à ce point-ci montre l’ampleur de l’échec qu’aura été la pause des Fêtes, sur laquelle on comptait pour aplatir la courbe des hospitalisations. Un échec décourageant, frustrant, pour lequel nous portons tous une part de responsabilité.

Lundi, les autorités et les experts en étaient encore à analyser dans quels contextes sont survenues ces milliers d’infections pendant les Fêtes. Mais un constat général se dessine : celui de la négligence et du non-respect des consignes.

De nombreux Québécois, on l’a maintenant compris, ont triché et rencontré la famille et des amis pendant les vacances. Si bien que les enquêtes épidémiologiques se butent aujourd’hui à un problème : les gens déclarés positifs n’osent plus dévoiler la liste de leurs contacts, faisant courir le risque que leurs proches contaminent d’autres gens.

Après tous les avertissements, et alors qu’on sait à quel point ce virus sournois profite de nos moindres erreurs pour nous infecter, un tel relâchement est déplorable.

Si la transmission communautaire a dominé pendant les Fêtes, elle n’est pas la seule responsable. Dans les hôpitaux, certains employés baissent encore la garde, notamment pendant leurs pauses. Sur le terrain, on raconte que des tables qui avaient été disposées à deux mètres de distance doivent être séparées à nouveau chaque matin…

Dans certaines résidences pour aînés, les repas se prennent encore dans des aires communes, et des activités sociales se déroulent sans distanciation physique. Et les éclosions qui secouent les milieux de travail laissent croire que l’application des règles n’y est pas toujours aussi rigoureuse que souhaité.

Bref, à la maison comme au boulot, beaucoup de gens ont triché, souvent d’une façon qui peut sembler anodine. Pris individuellement, ces gestes paraissent sans conséquence. Collectivement, ils ne sont rien de moins que tragiques. D’où cette idée de remettre le Québec sur pause pour calmer le jeu.

Rajouter une couche de mesures sanitaires alors qu’on peine à faire respecter celles qui sont déjà en place est loin d’être idéal. On aurait préféré, et de loin, qu’on force la minorité qui défie les règles à s’y conformer. Notons que pendant la semaine de Noël, le Service de police de la Ville de Montréal n’a distribué que 34 constats d’infraction pour non-respect des mesures sanitaires, 10 fois moins que la semaine précédente. De toute évidence, c’était insuffisant.

Mais on ne refera pas le passé. Les modélisations de l’Institut national de santé publique du Québec montrent que les hôpitaux risquent de déborder dans quelques semaines à peine. Il faut des résultats rapides, et la marge de manœuvre s’amenuise.

Les écoles pourraient-elles être épargnées et rouvrir comme prévu la semaine prochaine ? Cette option, on le devine, sera étudiée sur toutes ses coutures par le gouvernement. On connaît les répercussions de l’apprentissage à distance sur les élèves et sur les parents, et François Legault a toujours dit que sa priorité était de garder les écoles ouvertes. S’il décide de les fermer, c’est qu’il juge qu’il n’existe pas d’autre choix pour protéger nos hôpitaux. Les élèves et les parents pourront se consoler en espérant que le calvaire soit temporaire.

C’est un véritable électrochoc que s’apprête à servir le gouvernement aux Québécois. Difficile, maintenant, de ne pas comprendre le message : la situation est sérieuse, et l’hiver sera long.

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