La vitesse à laquelle se propage Omicron porte un dur coup au moral de tout le monde, mais il faudra porter une attention particulière à celui des jeunes.

Vrai, la situation actuelle imposait qu’on ferme rapidement les écoles. On aurait dû les fermer dès vendredi dernier pour tout dire. Il faut éviter de favoriser les foyers d’éclosion.

Cela dit, soyons réalistes, les pronostics pour un retour en classe début janvier sont assez sombres. Alors que les jeunes avaient enfin retrouvé un semblant de normalité, ils voient arriver un train de nouvelles mesures, et l’éventualité d’un autre confinement, avec découragement. On les comprend.

Dans tout ce branle-bas de combat pour riposter au nouveau variant, ne les négligeons pas.

La vulnérabilité des jeunes est peut-être moins apparente que celle de leurs grands-parents, mais elle n’en est pas moins importante.

On ne compte plus les études qui ont documenté les impacts de la pandémie sur leur santé mentale. Depuis l’arrivée de la COVID-19 dans nos vies, leur anxiété a augmenté. Ils dorment mal, font moins d’exercice et passent de longues heures devant les écrans. Le manque de contacts sociaux chez les adolescents et les jeunes adultes, qui ont passé beaucoup de temps isolés, est particulièrement inquiétant pour leur développement.

Dans une étude menée en janvier dernier par la professeure-chercheuse à la faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke Mélissa Généreux, on apprenait que près d’un jeune sur deux fréquentant un établissement scolaire ressentait des symptômes compatibles avec des troubles anxieux ou une dépression majeure. Nous étions au pire de la crise, alors que toutes les écoles étaient fermées et que les étudiants poursuivaient leur scolarité à distance. Quelques mois plus tard, le CHU Sainte-Justine observait pour sa part que le nombre de consultations pour trouble alimentaire avait doublé au sein de son établissement.

Nous ne voulons pas retourner là.

Le plus récent rapport concernant la santé mentale des jeunes date du 13 décembre dernier et il s’appuie sur un sondage fait auprès de 10 000 Canadiens. Réalisé par la Commission de la santé mentale du Canada, il s’intéresse à plusieurs sous-groupes de la société, dont les jeunes qui ont déjà une vulnérabilité, soit une consommation d’alcool et de cannabis déjà installée, ou des problèmes de santé mentale. Parmi les jeunes répondants de 16 à 24 ans, 45 % font état de symptômes d’anxiété modérés à graves, et plus du tiers (40 %) affirment que leur consommation d’alcool ou de cannabis a augmenté au cours du dernier mois. Ils disent aussi être moins en mesure de gérer le stress en pandémie.

Ces données sont inquiétantes. Elles montrent que les jeunes qui étaient déjà à risque avant la pandémie sont encore plus vulnérables. Sans aide, ils risquent de s’enliser dans la consommation chronique et la dépendance. La Commission réitère d’ailleurs l’importance de poursuivre les investissements dans les services de soutien en santé mentale et en usage de substances destinés aux jeunes.

Il faudra garder toutes ces études à l’esprit si jamais on envisage à nouveau la fermeture des établissements d’enseignement au retour des Fêtes.

Car il serait naïf de penser que ce que vivent les jeunes actuellement n’aura pas d’impact sur leur avenir, sur les adultes qu’ils deviendront. Après presque deux ans de pandémie, une portion de cette « génération COVID » restera vraisemblablement marquée.

Et c’est encore plus vrai dans les familles défavorisées chez qui la perte d’emploi, le travail dans un milieu qui n’est pas toujours sécuritaire, le manque d’espace et la promiscuité ne font qu’augmenter le niveau d’anxiété.

Ne minimisons pas tout ce que les jeunes ont perdu : au-delà des bals de fin d’études, des remises de diplôme, des voyages entre amis ou d’une simple insouciance propre à leur âge, la pandémie les a privés de rites de passage, de rencontres amicales et d’une multitude de moments charnières qui définissent la jeunesse. Des moments qui ne reviendront plus.

Ajoutons à cela la crise des changements climatiques en toile de fond qui les rend encore plus pessimistes. Un sondage réalisé l’automne dernier par la firme Ipsos auprès de 501 jeunes Canadiens âgés de 18 à 29 ans révélait que plus de la moitié des répondants (59 %) éprouvait de la peur face aux changements climatiques. À peu près la même proportion (57 %) de jeunes se disaient nerveux, et plus du tiers (41 %) se sentaient coupables. Bref, leur santé mentale est mise à rude épreuve par les temps qui courent.

Jeudi dernier, le premier ministre Legault a réitéré l’importance de garder les écoles ouvertes. Ce sont bien sûr les règles de la santé publique qui dicteront la suite des choses, mais n’oublions pas les jeunes dans la prise de décision. Leur bien-être en dépend.

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