La question n’était pas de savoir SI le gouvernement fédéral allait opter pour un boycottage diplomatique des Jeux olympiques de Pékin, mais plutôt QUAND cette décision serait annoncée.

Il aurait été à la fois gênant et incohérent pour Ottawa de ne pas aller de l’avant. Plusieurs très bonnes raisons l’y incitaient.

Parce que nous sommes tous, comme l’a dit mercredi Justin Trudeau, « profondément troublés par les violations des droits de la personne » du régime chinois. À commencer par le sort de la minorité ouïghoure.

Parce que le Canada en a fait les frais, aussi. Les détentions arbitraires de Michael Spavor et de Michael Kovrig en sont l’exemple le plus frappant.

Et parce que certains de nos plus grands alliés parmi les démocraties occidentales ont eux-mêmes annoncé un boycottage diplomatique.

Après avoir plaidé que nos alliés devaient faire preuve de solidarité face à la Chine – et tout spécialement dans le dossier des détentions arbitraires, où leur appui fut crucial –, de quoi aurions-nous eu l’air si on leur avait tourné le dos pour les JO ?

Cette décision va forcément déplaire à Pékin. Mais ce n’est pas non plus une déclaration de guerre. Loin de là.

Nos athlètes iront en Chine. Et l’évènement risque fort d’être un succès.

Un boycottage diplomatique était par conséquent le strict minimum acceptable. C’est ce que notre équipe éditoriale avait soutenu récemment.

Ne péchons pas par excès de naïveté, toutefois. Notre relation avec Pékin, même si Meng Wanzhou a pu retourner en Chine alors que les deux Michael étaient libérés, continue de battre de l’aile.

C’est pourquoi, maintenant que l’abcès du boycottage diplomatique est crevé, il importe de se pencher rapidement sur le défi diplomatique que représente cette relation.

Elle doit être recalibrée, et Ottawa a donc besoin sans plus tarder d’un nouvel ambassadeur à Pékin.

Car on a aussi annoncé cette semaine que Dominic Barton, l’actuel ambassadeur, mettra fin à son mandat à la fin de l’année. Après seulement deux ans en poste.

Son mandat n’a pas été de tout repos, c’est le moins qu’on puisse dire. N’empêche que son départ hâtif est malheureux.

Son expérience en temps de crise, chèrement acquise, aurait été précieuse alors que nous sommes encore en zone de turbulences.

Cet épisode illustre les problèmes potentiels des nominations politiques pour pourvoir des postes d’ambassadeurs aussi cruciaux.

Ni Dominic Barton ni son prédécesseur, l’ancien ministre John McCallum, n’étaient des diplomates de carrière.

Faut-il rappeler que John McCallum a été sur place moins de deux ans… avant de démissionner en pleine controverse ?

Il y a assurément certains avantages à une nomination politique. Il est possible de choisir un candidat avec des compétences particulières, s’il est issu du milieu des affaires, par exemple. Ou encore de sélectionner quelqu’un avec qui le premier ministre pourrait avoir une relation privilégiée.

Il y a aussi, par contre, de nombreux inconvénients.

Avec un diplomate de carrière, on s’assure d’avoir quelqu’un qui maîtrise la langue de son pays hôte et qui a développé une fine connaissance de celui-ci.

Quelqu’un, aussi, qui connaît par cœur les défis et enjeux de son travail de diplomate et qui est capable de tisser d’importants réseaux de contacts sur le terrain.

Tout ça n’est pas nécessairement évident lorsqu’on recrute à l’extérieur du corps diplomatique.

S’improviser ambassadeur du jour au lendemain n’est pas donné à tous, et c’est assurément encore moins facile si on ne maîtrise pas la langue du pays dans lequel on se trouve.

Ajoutons que les nominations politiques ne sont pas très bonnes pour le moral des membres du corps diplomatique.

Et la nouvelle ministre fédérale des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a tourné le fer dans la plaie en soutenant que Dominic Barton « passera à l’histoire comme l’un des grands diplomates du Canada ».

D’abord c’est faux.

Ensuite c’était terriblement maladroit.

On ne peut bien sûr pas exclure que l’on trouve, pour remplacer Dominic Barton, un candidat exceptionnel à l’extérieur du corps diplomatique.

Mais tout indique qu’Ottawa aurait avantage, cette fois, à privilégier un diplomate de carrière à une vedette de la finance ou du monde politique.

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